Les Albouy, une famille audoise en Orient à la veille de la 1ère guerre mondiale

     Je vous invite à voyager en Orient sur les traces de mes aïeux audois et ariégeois au début du XXe siècle. Il y a un siècle la France est la seconde puissance mondiale et possède un vaste empire colonial. Elle développe ses colonies d’Afrique du Nord et participe, en concurrence avec d’autres puissances, au développement de l’Empire ottoman. C’est dans ce cadre que mon trisaïeul Raymond Albouy est appelé à la construction de chemins de fer et de routes en Tunisie puis au Moyen-Orient. Mais la guerre de 14-18 bouleverse tout.

La citadelle d'Alep. Carte postale envoyée par Raymond Albouy à son épouse en 1913

La citadelle d’Alep. Carte postale envoyée par Raymond Albouy à son épouse en 1913

     Raymond Jean Albouy nait à Pexiora, un gros village du Lauragais audois, le 23/04/1863. Il est issu par son père d’une modeste famille d’agriculteurs du Lauragais et par sa mère d’une famille d’éclusiers du Canal du Midi qui lui a sans doute donné son goût pour les travaux publics et le voyage.

Maison de l'écluse de Tréboul

L’écluse de Tréboul à Pexiora. C’est dans cette maison d’éclusier que vivaient les ancêtres maternels de Raymond Albouy.

     Raymond Albouy commence sa carrière en 1882 comme employé des Ponts et chaussées dans le département de l’Aude, au service des études et travaux du chemin de fer de Quillan à Rivesaltes. En 1887 il est muté à Foix dans un emploi similaire pour la réalisation du chemin de fer de Saint-Girons à Foix. C’est dans la capitale de l’Ariège qu’il rencontre son épouse, Rose Lagarde dite Emma, fille d’un employé aux chemins de fer. Le couple a deux enfants : Raymond Jean, né en 1896, et Marguerite, né en 1899.

Dossier d'ingénieur des mines de Raymond ALBOUY

Extrait d’un état de service de Raymond Albouy (Archives nationales Pierrefitte, F/14/1958)

CPA Tunis quartier Halfaouine Avers

     Raymond Albouy, remarqué pour ses qualités, est mis à disposition du Ministère des affaires étrangères. Par décret du 15 septembre 1900 il est nommé Ingénieur-adjoint à la Direction générale des Travaux publics de Tunisie, attaché au Service des Chemins de fer. A cette époque la Tunisie est depuis une vingtaine d’année un protectorat français : le chef de l’état, le bey de Tunis a dû céder presque tous ses pouvoirs à la France et ne possède plus qu’un pouvoir symbolique. L’administration française domine et développe le pays. Elle a besoin pour cela d’ingénieurs tels que Raymond Albouy. C’est pourquoi toute la famille, accompagnée d’un cousin de Raymond, le jeune Raymond Mercier, s’installe à Tunis au 14 rue d’Athènes.

CPA Sfax l'hôtel de  ville Avers

Carte postale de Sfax, l’hôtel de ville. C’est dans cette ville, fréquentée par Raymond Albouy pour son travail que son cousin Raymond Mercier exerce le métier d’instituteur pendant quelques années.

     La vie du cousin (né à Pexiora le 28 mars 1883) est connu par sa notice nécrologique publiée dans le Bulletin de l’enseignement public :  Raymond Mercier fait des études comme élève-maître, à l’Ecole Normale de Tunis, alors rattachée au collège Alaoui. Sorti de l’Ecole en 1903, avec le brevet supérieur, il exerça d’abord comme instituteur à Gabès, puis à l’Ecole primaire supérieure de Sfax. Après avoir songé d’abord à la préparation du professorat des écoles normales, il demanda un congé de deux ans — du 1er octobre 1908 au 30 septembre 1910 — et alla achever ses études à la Faculté des Sciences de Toulouse, où il conquit brillamment sa licence ès-sciences. Revenu en Tunisie, il rentra au collège Alaoui comme professeur et y remplit ses nouvelles fonctions à l’entière satisfaction de ses chefs et pour le plus grand profit de ses élèves. Mobilisé en 1914, puis mis en sursis d’appel le 1er octobre 1917, il avait pu remplir pendant toute la dernière année scolaire une tâche qu’il aimait et se préparait à la reprendre, lorsque la mort est venu l’enlever. Ses obsèques eurent lieu le 19 septembre, à 10 heures du matin. Le deuil était conduit par son cousin, M. Albouy, ingénieur des Ponts et Chaussées. Le Directeur général, absent de Tunis, s’était fait représenter. Le directeur et les professeurs du Collège Alaoui étaient venus rendre les derniers devoirs à leur regretté collègue. Sur la tombe, M. Bec, directeur du Collège, prononça un discours ému, dans lequel il retraça la carrière si brusquement interrompue du jeune professeur. « C’était, dit en terminant M. Bec, le type du professeur consciencieux qui se fait une haute idée de sa tâche, de sa mission, de son rôle social. Il aimait son métier; il avait la foi, sans laquelle il n’est pas de bon éducateur, la foi dans l’utilité de la charge assumée; il avait en un mot le goût de son devoir. » Bulletin officiel de l’enseignement public, 1918 p. 360-361.

CPA Constantinople panoramique Top Hané et Bosphore Revers

Carte postale envoyée le 20 janvier 1913 depuis Constantinople par Emma Albouy à son cousin par alliance Raymond Mercier, alors professeur à l’École primaire supérieure de Tunis (actuellement Lycée Alaoui). Remarquer le timbre autrichien à l’effigie de François-Joseph: la plupart des puissances européennes disposaient de bureaux de postes à Istanbul et quelques autres villes de l’empire.

     En tant qu’ingénieur Raymond Albouy est chargé de surveiller les travaux de construction et d’exploitation des chemins de fers de Tunisie, concédés pour l’essentiel à la Compagnie des chemins de fer Bône-Guelma. Sous son contrôle sont réalisées les lignes reliant la côte à l’intérieur du pays et la ligne allant de Sousse à Sfax, soit plus de la moitié du réseau tunisien actuel. La qualité de son travail lui vaut l’obtention de deux distinctions honorifiques. Il reçoit du bey, sur proposition du Résident général de la France, le titre d’officier du Nicham-Iftikhar. Il est également nommé officier des Palmes académiques. Peut-être a-t-il donné quelques cours dans une école technique de Tunis pour mériter cette dernière distinction.

     Raymond étant souvent en tournée d’inspection c’est Emma qui est chargée d’élever les enfants du couple. En 1906 un drame secoue la famille : la petite Marguerite, âgé de sept ans décède suite à une insuffisance cardiaque.

CPA Constantinople panoramique Top Hané et Bosphore Avers

Constantinople. Vue panoramique du Top-Hané et du Bosphore. Avers de la carte postale écrite par Emma Albouy le 10 janvier 1913.

     Remarqué une nouvelle fois par sa hiérarchie Raymond Albouy est choisi en 1909 comme inspecteur des Ponts et Chaussées auprès du ministère des travaux publics de l’Empire ottoman. Cet Empire n’est plus ce qu’il était un siècle plus tôt : il se réduit comme une peau de chagrin sous la pression des nationalismes locaux et des puissances européennes. Au moment où la famille Albouy s’y installe il s’étend encore sur une partie des Balkans, l’Anatolie, la Mésopotamie (actuelle Irak), la Syrie et l’Arabie. C’est un empire multinational où les Turcs sont minoritaires numériquement face aux autres peuples (Grecs, Arméniens et Assyriens orthodoxes, Juifs, Druzes et Arabes musulmans…). Les cartes postales ci-dessous, envoyées ou reçues par la famille Albouy, nous montrent quelques aspects de cet empire.

CarteEmpireOttoman

Carte de l’Empire ottoman au début du XXe siècle

Angora (actuellement Ankara), la Poste le sérail Hadji Bayram

Angora (actuellement Ankara), la Poste, le sérail, la mosquée Hadji Bayram

Baalbek corniche du temple de Jupiter

Baalbek (Syrie) : corniche du temple de Jupiter. L’homme qui sert d’échelle porte un costume occidental, adopté depuis le XIXe siècle par les classes dirigeantes de l’empire, associé au traditionnel fez, coiffe empruntée aux Byzantins au Moyen Âge. L’association de ces deux éléments constitue le costume dominant des élites dans l’Empire, quelque soit le peuple ou la religion.

Bérédjik (actuellement Bireçik en Turquie, à la frontière avec la Syrie, anciennement Zeugma, Birtha ou Bira). Au premier plan l’Euphrate, au second la forteresse mamelouk.

CPA Damas grande mosquée et vue générale Avers

Damas (Syrie), grande mosquée des Omeyyades.

CPA Damas mur par lequel St Paul s'est enfui Avers

Damas (Syrie), mur par lequel St Paul s’est enfui

CPA Euphrate Avers

L’Euphrate. Carte postale postée de Bireçik par Raymond Albouy le 29 mars 1913. Celui-ci annonce à sa femme qu’il va faire une promenade en barque sur le fleuve.

CPA Trébizonde Suite de Molos Avers

Trébizonde (actuellement Trabzon en Turquie). Au début du XXe siècle cette ville, qui a été entre 1204 et 1461 capitale de l’Empire grec de Trébizonde, est encore majoritairement peuplée de Grecs et d’Arméniens. Ils seront massacrés ou déportés par les Turcs pendant la première guerre mondiale.

CPA Smyrne château génois Avers

Smyrne, le château Génois. Construit par les croisés.

CPA Smyrne les aqueducs romains Avers

Smyrne (actuellement Izmir en Turquie). Les aqueducs romains.

CPA Smyrne vue du quai Avers

Smyrne (actuellement Izmir en Turquie). Quai sur la mer Egée.

CPA Smyrne vue générale Avers

Smyrne (actuellement Izmir en Turquie). Au début du XXe siècle la ville est majoritairement peuplée de grecs orthodoxes. On voit d’ailleurs le dôme d’un église au premier plan. La ville compte aussi des minorités juives, arméniennes et européennes importantes.

Smyrne vue générale du quartier turc

Smyrne vue générale du quartier turc. Les mosquées turques ne se distinguent des églises orthodoxes que par la présence d’un minaret.

     Au cours du XIXe siècle l’Empire ottoman se modernise sous l’influence des puissances européennes, notamment de la France et de l’Angleterre. Suite à la révolution des Jeunes turcs en 1909 le nouveau gouvernement ottoman ressent la nécessité de développer un réseau moderne de transports, fondé notamment sur les routes et le chemin de fer. C’est dans ce but que ce gouvernement fait appel à des ingénieurs français comme Raymond Albouy. Celui-ci part à Istanbul en laissant provisoirement sa famille en Tunisie comme en témoigne le texte des deux cartes postales suivantes adressées à son épouse :

Constantinople le 10 décembre 1910. Chère Emma, je suis à peu près installé en garçon. J’ai dîné avant hier chez M. Picard. Hier j’ai commencé de visiter les lycées. Je continuerai de lundi à vendredi inclus, jours pendant lesquels nous avons congé à l’occasion du Beiram [nom turc de la fête musulmane de l’Aïd, ici l’Aïd al-Adha ou fête du sacrifice, commençant le lundi 12 décembre 1910]. Je t’écrirai longuement vers mardi. Bon baiser pour toi et Raymond. [Signé] Albouy.

Constantinople le 5 janvier 1911. A cause de l’encombrement des lits et des sommiers il est préférable que tu les vendes à n’importe quel prix. Nous en achèterons en fer. Un baiser pour Raymond et pour toi. Avant de partir de Tunis retire à la Bibliothèque les 5100 Fr. de garantie demande au représentant de l’assurance sur la vie et le conservateur si tu peux payer l’annuité 400 fr. environ.

     Emma et son fils rejoignent Raymond entre janvier et mai 1911. La famille réside au 12 rue de l’Agha dans le quartier de Péra (actuellement Beyoğlu), le quartier des européens de Constantinople situé au nord de la Corne d’or. (A cette époque la partie européenne de la ville porte encore son nom antique). Mais Raymond fils ne reste pas longtemps à Constantinople. Il est envoyé, probablement dès septembre 1911, poursuivre ses études secondaires à Toulouse. Il est cependant de retour pour les vacances en juillet de l’année suivante.

CPA Budapest - Avers

Budapest, une étape de l’Orient Express entre Paris et Constantinople. Carte postale adressée à Emma Albouy

     L’année suivante ce sont les parents qui rejoignent le jeune Raymond en France. La famille Albouy s’y s’offre des vacances pendant l’été 1913. Le trajet d’Istanbul à Paris se fait sans doute par l’Orient Express. Sur la carte ci-dessus envoyée de Budapest à Emma Albouy, une de ses correspondantes en décrit l’itinéraire : « 10-6-13. Chère amie, comme suite à ma carte d’hier, trouvons Budapest plus beau que Bucarest. A voir encore Vienne, Berlin… Paris et Pexiora. Apprécierons après. Meilleurs souvenirs de tous pour vous à M. Albouy. Circulons à notre aise sans rue et boulevards magnifiques. » Les Albouy empruntent le même chemin peu de temps après. Ils font une étape à Foix chez les Lagarde, la famille d’Emma, puis vont chercher la fraicheur et le repos dans la station thermale d’Aulus-les-Bains située dans les Pyrénées ariégeoises. En septembre ils sont à Paris, prêts à reprendre le train vers Istanbul.

Document en possession de Gauthier LANGLOIS

Lettre envoyée par ses parents le 24 avril 1914 à Raymond Albouy fils, alors élève en mathématiques élémentaires au lycée de Toulouse.
On notera que les timbres et le cachet postal sont bilingues (turc et français). L’usage du français manifeste l’importante influence de la France sur l’Empire ottoman. Mais l’influence Allemande finira par l’emporter sur le plan militaire. Notons aussi que le turc est alors noté en caractères arabes. En 1928 Atatürk imposera l’usage de l’alphabet latin pour noter le turc.

     Tandis que le fils poursuit ses études, le père travaille au Ministère des travaux publics situé dans le quartier de Péra où il habite avec sa femme Emma. Il porte le titre de chef des bureaux de l’inspecteur général des Travaux publics. Le travail dans l’administration turque est facilité par l’existence, dans cette administration, de nombreux francophones formés notamment au lycée de Galatasaray. C’est le cas de Suleyman Sirri, alors ingénieur en chef adjoint des Travaux publics de la province de Syrie, nommé ministre des Travaux publics de Turquie en 1925.

Lettre de Suleyman Sirry à Raymond Albouy, 1925

Lettre de Suleyman Sirri, ministre des Travaux Publics de Turquie, remerciant Raymond Albouy. Angora (actuellement Ankara), 25 juin 1925. (Ce ministre décèdera le 15 décembre de la même année.)

     Raymond Albouy travaille aussi avec des français, notamment un certain Picard qui l’appelle mon ami, chez qui il dîne à Constantinople et qui lui écrit des cartes postales de Londres, de Milan ou de l’Inde et un certain Marcel Berthet qui lui écrit de Balikesir (Anatolie), où il réalise des études tachéométriques.

Un pont qui a peut-être été réalisé sous la direction de Raymond Albouy : le pont nouveau sur le fleuve du chien au Liban. Carte envoyée par M. Picard à Raymond Albouy en 19011.

Un pont qui a peut-être été réalisé sous la direction de Raymond Albouy : le pont nouveau sur le fleuve du Chien au Liban. Carte envoyée par M. Picard à Raymond Albouy en 1911.

     Raymond Albouy ne se limite pas à un travail de bureau. Il réalise également des tournées d’inspection. On peut le suivre grâce aux cartes postales qu’il envoie à sa femme à l’occasion de ses tournées. Ainsi en juillet 1912 il passe par Samson, Kérassunde et Trébizonde sur la Mer Noire. En mars 1913 il passe par Smyrne (actuellement Izmir), Rhodes (Grèce), Baalbek (Syrie), Beyrouth (Liban) et Alep (Syrie).

—Rhodes, salle d'Armes des chevaliers de l'ordre des Hospitaliers. De 1307 à sa prise par les Turcs en 1522 Rhodes est le siège de l'ordre des Hospitaliers Saint-Jean-de-Jérusalem. En 1912 les Italiens en font la conquête sur les Turcs. On voit d'ailleurs sur la carte des soldats italiens reconnaissables à leur pompon. L'île est alors peuplée de Grecs, de Turcs et de Juifs. Raymond Albouy y fait escale entre Smyrne et la Syrie le 17 mars 1913 et constate une situation tendue :

—Rhodes, salle d’Armes des chevaliers de l’ordre des Hospitaliers. De 1307 à sa prise par les Turcs en 1522 Rhodes est le siège de l’ordre des Hospitaliers Saint-Jean-de-Jérusalem. En 1912 les Italiens en font la conquête sur les Turcs. On voit d’ailleurs sur la carte des soldats italiens reconnaissables à leur pompon. L’île est alors peuplée de Grecs, de Turcs et de Juifs. Raymond Albouy y fait escale entre Smyrne et la Syrie le 17 mars 1913 et constate une situation tendue : « Les Italiens font des difficultés pour nous laisser descendre à terre », affirme-t-il. En effet les Turcs n’ont certainement pas digéré cette conquête et les Grecs réclament le rattachement de l’île à la Grèce.

     En mai 1914 il se trouve à Angora ou Ankara qui n’est pas encore la capitale de la Turquie mais une petite ville de province au centre de l’Anatolie.

CPA Angora intérieur de l'Augusteum Avers CPA Angora intérieur de l'Augusteum Revers

     Des problèmes de santé l’obligent ensuite à cesser ses tournées d’inspection. (Voir certificat ci-dessous).

Certificat médical de Raymond Albouy, 15 juin 1914

     Mais la guerre va interrompre le séjour de la famille en Orient. Le premier à partir est Raymond fils qui, après avoir passé l’été avec ses parents, repart vers la France en septembre, sans doute à l’annonce de l’entrée en guerre de la Turquie aux côtés de l’Allemagne contre la Russie, le 26. Le 28 il profite d’une escale de 4 heures à Athènes pour envoyer une carte à sa mère restée à Istanbul. Nouvelle escale à Malte le 13 octobre d’où il envoie la carte suivante : « Lavalette le 13 octobre 1914. Chers parents, je suis arrivé à Malte ce matin à 9 h. Je vais à terre jusqu’à 12 h. J’ai fait la connaissance de quelques aspirants de marine française qui me promènent dans la ville qui est très pittoresque. Nous repartons à une heure après midi. Je vous embrasse très affectueusement. »

Le port de La Valette sur l'île de Malte.  Contrôlant le passage entre le bassin occidental et le bassin oriental de la Méditerranée Malte occupe une position stratégique convoitée. Siège de l'ordre des Hospitaliers entre 1530 et 1798 Malte est alors un bastion de défense chrétienne contre les Turcs. Les Anglais s'en emparent ensuite et en font, pendant les deux guerres mondiales, une importante base navale.

Le port de La Valette sur l’île de Malte. Contrôlant le passage entre le bassin occidental et le bassin oriental de la Méditerranée Malte occupe une position stratégique convoitée. Siège de l’ordre des Hospitaliers entre 1530 et 1798 Malte est alors un bastion de défense chrétienne contre les Turcs. Les Anglais s’en emparent ensuite et en font, pendant les deux guerres mondiales, une importante base navale. (Carte postale envoyée par Raymond Albouy fils à ses parents).

     La carte arrive à Constantinople le 29. A cette date la guerre est déjà commencée mais l’Empire ottoman ne s’est toujours pas déclaré comme ennemi de la France. Raymond père conserve donc ses fonctions. La rupture des relations diplomatiques entre la France et l’Empire ottoman intervient deux jours plus tard, le 31 octobre. Elle faite suite à l’attaque sans avertissement par les Turcs, deux jours avant, du port russe d’Odessa où un navire français a été canonné.

Lettre adressée à Raymond Albouy fils ?, 1914

Yvonne Bisson qui épouse en 1919 Raymond Albouy fils a annoté ainsi l’enveloppe de cette lettre adressée à son mari : « Lettre partie de Constantinople après la rupture des relations diplomatiques [31 octobre] et parvenue en France bien après la déclaration de guerre entre la France et la Turquie [5 novembre 1914]. » Cette enveloppe contenait sans doute une lettre des parents Albouy annonçant leur retour en France.

Bateau de guerre turc portant le nom de Barberousse, amiral de la flotte turque et gouverneur d'Alger au XVIe siècle. (Carte postale envoyée à Raymond Albouy père en octobre 1912)

Le cuirassé turc Barbaros Hayreddin. Mis en service en 1891, c’est l’un des deux cuirassés achetés en 1910 à la marine allemande. Les Turcs le rebaptisent alors en l’honneur de Barberousse, amiral de la flotte turque et gouverneur d’Alger au XVIe siècle. Il est coulé par un sous-marin britannique en 1915 lors de la campagne des Dardanelles. (Carte postale envoyée à Raymond Albouy père en octobre 1912)

     Dans les heures ou jours qui suivent Raymond Albouy père et sa femme quittent l’Empire ottoman pour la France. Quelques jours après les Anglais et les Français bombardent l’entrée des Dardanelles.

     Après un bref passage en Tunisie en 1918, Raymond père est affecté comme ingénieur à la Direction générale des services techniques de reconstruction de l’Aisne, département fortement touché par les destructions de la guerre. Il prend ensuite sa retraite à Toulouse en 1926. À son décès en 1933 il est enterré à Pexiora dans l’Aude.

     Nous verrons le destin de son fils et son épouse dans un autre article.

Pour en savoir plus :

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5 commentaires pour Les Albouy, une famille audoise en Orient à la veille de la 1ère guerre mondiale

  1. Angelique dit :

    merci pour ce travail de recherche historique , j’adore les cartes postales qui si à une époque elles étaient envoyé a une fin personnelle , aujourd’hui en rentrant dans cette intimité elles nous parlent d’une période historique , et cela reste un beau support pour l’historien ,
    bref merci Gauthier de nous faire partager tout cela en sachant le temps que devez y consacré

  2. Hertz dit :

    Je me suis régale en lisant ce récit si riche et illustre Merci Gauthier

  3. Pelatan François dit :

    Très intéressant ! juste une précision sur la famille lauragaise à Pexiora même si c’est pas l’objet principal de l’article : quelles productions agricoles faisaient les parents de Raymond Albouy à Pexiora ? propiétaires, fermiers ? Je suis sur la photo aérienne IGN au dessus de Pexiora et je vois qu’il y un lieu-dit  » le Bouy » entre le village et le canal….
    Merci

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