La correspondance amoureuse d’un financier en Languedoc avec la femme de chambre de la princesse de Condé (XVIIIe siècle)

Fig. 1 : Dos de la lettre du 24 août 1741 de François de Frézals à son épouse Louise de Larzillière. Pour être expédiée la lettre était pliée et fermée par un cachet de cire, visible ici en deux fragments. Sur le dos figure l’adresse (Madame Frezals a l’hotel de Condé a Paris) et le cachet de la poste de Toulouse

Entre 1732 et 1741 François de Frézals, directeur des domaines de la généralité de Toulouse entretient une correspondance avec son épouse Louise de Larzillière, femme de chambre de la princesse de Bourbon-Condé à Paris. Les seize lettres conservées, rédigées dans un style galant, libertin, érotique ou poétique, nous font pénétrer dans l’intimité d’un couple de la bourgeoisie cultivée du règne de Louis XV. On y perçoit aussi les rapports du couple avec la haute aristocratie (les Egmont, Bourbon-Condé, Chevreuse) et le monde de la finance (comme les fermiers généraux). L’édition de ces lettres constitue une intéressante source sur la société du XVIIIe siècle, en particulier sur l’amour et la santé.

Présentation

Peu de correspondances privées du XVIIIe siècle, mis à part celles de célébrités politiques ou littéraires, ont été publiées. Ces écrits du for privé constituent pourtant une source précieuse pour l’historien[1]. Elles nous font pénétrer dans l’intimité des familles. Telle est le cas des lettres envoyées par François de Frézals, directeur des domaines à Montpellier puis Toulouse, à son épouse, Louise de Larzillière, femme de chambre de la princesse de Condé[2] (fig. 2).

Fig. 2 : Portrait présumé de Louise de Larzillière, réalisé après son remariage en 1746. Photo et collection Henri Merlin.

Les deux époux sont issus d’un milieu de robe moyenne ou de domesticité au service des comtes de Braine qui sont, dans la première moitié du siècle, Louise, duchesse de Durfort-Duras, sa fille Henriette et l’époux de cette dernière, le prince d’Egmont-Pignatelli. Le père de François est receveur du comté de Braine et subdélégué de l’intendant de Soissons. Celui de Louise est valet de chambre de la duchesse.

Si l’on suit des érudits du XIXe siècle, les Frézals sont issus d’une très ancienne famille de la noblesse d’épée et de robe d’origine languedocienne et rouergate[3]. Mais cette filiation n’est sans doute qu’une tradition inventée pour se donner des origines prestigieuses comme l’on fait de nombreuses familles bourgeoises anoblies[4]. Son père est en réalité issu d’une famille de petits bourgeois du village de Saint-Pantaléon dans le diocèse de Cahors. En 1698, il réside à Milly-sur-Thérain, village situé à proximité de Beauvais et y exerce la fonction de garde du corps du seigneur du lieu, le maréchal de Boufflers. Il s’y marie avec Françoise Cosme, fille d’un officier du roi. C’est dans ce village du Beauvaisis que, le 25 octobre 1699, naît François, leur premier enfant. Quelques années après, le couple s’installe à Braine où Bernard, qui s’intitule conseiller du roi, est l’un des receveurs du comté[5] puis cumule cette charge avec celle de subdélégué de l’Intendant de Soissons dans la ville.

Fig. 3 : François de Frézals et sa famille

Les Larzillière forment une famille de domestiques et d’officiers au service de la haute aristocratie. Claude de Larzillière, le père de Louise, est d’abord valet de chambre tapissier de Louise Eschalard de la Marck, héritière du comté de Braine et duchesse de Durfort-Duras par son mariage. La mère de Louise, Claude Gérard de Larzillière, est issue d’une famille de laboureurs, de marchands et d’officiers seigneuriaux. Ils se sont mariés en 1710 en présence du comte de la Marck, de la duchesse de Duras, de sa fille la future comtesse d’Egmont et de l’intendant de Soissons. Après la mort de la duchesse, le père devient officier du dauphin Louis de France (futur Louis XV), puis valet de chambre de la comtesse d’Egmont. Le couple réside le plus souvent avec ses maîtres, à Paris ou à Braine (fig. 4) où leur fille Louise naît en 1711[6].

Fig. 4: Plan de la ville, du château et de l’abbaye de Braine en 1767. (Archives de l’Aisne, 8Fi1632). Ce plan est l’un des rares documents permettant de connaître le cadre de vie de François Frezals, Louise de Larzillière et leurs parents alors au service des comtes de Braine. Ils vivent avec leurs maîtres dans le château du Bas qui est agrémenté d’un grand parc à la française. À l’Est du château l’abbaye de Saint-Yved. À l’Ouest hors du plan subsistent les ruines romantiques du château médiéval de la Folie. De tous ces monuments, détruits à partir de 1793 ou pendant la guerre de 14-18, il ne reste plus grand-chose.

François et Louise, sa cadette de douze ans, sont élevés dans l’intimité de la famille comtale qu’ils suivent dans ses différentes résidences : le château du Bas à Braine (fig. 4), les hôtels d’Egmont et de Condé à Paris (fig. 5). Le niveau culturel de François, tel qu’on le déduit de ses lettres, montre qu’il a reçu une fort bonne éducation. Il connaît le latin, possède des références historiques et littéraires : il se compare à don Quichotte, qualifie un fermier général de Machiavel, fait allusion, avec l’oraison de Saint Julien, à un conte de Boccace repris par La Fontaine. Il fréquente le théâtre de Toulouse, lit les poètes à la mode tels que Willart de Grécourt et Régnier-Desmaret et entretient peut-être des relations épistolaires avec le poète Antoine de Laurès. Il compose des poèmes pour sa femme. Il consulte régulièrement la Gazette et le Mercure de France qui lui permettent de s’informer de l’actualité mondaine, politique et littéraire. Bref, c’est un homme cultivé, sans doute apprécié des cercles mondains et tout à fait conforme aux financiers tels que Guy Chaussinand-Nogaret les a décrits[7].

Fig. 5 : À Paris Louise de Larzillière vit aux côtés de la princesse de Condé sa maîtresse dans un véritable château urbain, l’hôtel de Condé et son jardin à la française. L’ensemble occupe la plus grande partie de l’îlot triangulaire situé en haut à gauche de l’image. L’hôtel est bordé à l’ouest par la rue de Condé, à l’est par la rue des Fossés Monsieur le Prince, au sud par la rue de Vaugirard qui la sépare du palais du Luxembourg. À l’ouest (en bas à droite sur l’image), l’église paroissiale Saint-Sulpice que fréquente Louise. Au centre, au 8 rue de Tournon et jouxtant au nord l’hôtel des Ambassadeurs, l’hôtel construit par Saint-Aignan où Louise logeait en 1732. Jouxtant ce dernier au nord, l’hôtel de Terrat (aujourd’hui hôtel de Brancas au 10 rue de Tournon) propriété en 1719 de Jean-Petit de Saint-Lienne dont Louise épouse le fils en secondes noces en 1747. (Perspective cavalière extraite du plan de Turgot, réalisé en 1734-1739).

En 1732 François de Frézals est au service de la Ferme générale. Alors qu’il fait la cour à son amie d’enfance, il est nommé en Languedoc. Au cours d’un séjour à Paris, les deux amis deviennent amants. De cette relation libertine naît en 1738 un garçon, mort en bas âge. À cette date, Louise est femme de chambre de Caroline de Hesse-Rheinfels, l’épouse du prince Louis-Henri, duc de Bourbon-Condé (fig. 6). Sans doute doit-elle cette place à la faveur d’Henriette Julie de Durfort-Duras, fille de la duchesse que le père de Louise servait. À cette date Henriette, plus connue sous son nom marital de Madame d’Egmont, est depuis longtemps la maitresse du duc de Bourbon-Condé[8]. Et c’est en partie sous l’influence de sa maitresse que le duc s’est marié à la jeune Caroline[9].

Fig. 6 : La maîtresse de Louise de Larzillière : Caroline-Charlotte de Hesse-Rheinfels-Rotenbourg et Kazazyan (1714-1741). En 1728, alors âgée de seulement de 14 ans, elle est mariée au duc Louis-Henri de Bourbon-Condé, prince de sang. Les fleurs de lis d’or sur champ azur de sa robe rappellent son rang de princesse royale. (Tableau d’après Pierre Gobert, Musée Condé, Chantilly).

François et Louise se marient en 1740, en présence de tous les Egmont-Pignatelli et Bourbon-Condé. Mais François doit retourner peu après en Languedoc, laissant sa femme à Paris. Ces séparations successives sont à l’origine de la correspondance conservée.

En effet, François réside à Toulouse où il exerce la fonction de directeur des domaines et de la régie du franc-fief de la généralité de Toulouse. En quoi consiste cette fonction ? La réponse nécessite un développement sur le fonctionnement des finances royales. Sous l’Ancien Régime la plus grande partie des revenus de l’État est affermée. Depuis 1726, l’ensemble des fermes est affermé par bail de six ans, à une compagnie financière de quarante membres, appelée Les fermes générales ou Fermes unies[10]. Cette compagnie avance à l’État la somme convenue par le bail, et en échange, se charge de percevoir les droits du roi en conservant de substantiels bénéfices. On dirait aujourd’hui que les Fermes générales assuraient une délégation de service publique. La Ferme des domaines[11] est l’une des cinq grosses fermes des Fermes générales. Elle est représentée au niveau de chaque généralité par un directeur des domaines. Selon Boquet, le « Directeur de la ferme des domaines, est le premier employé, chargé de diriger tous les autres, qui lui sont subordonnés, et qui doivent lui rendre compte de leurs régies, recette et administration. »[12] L’ensemble des droits perçus par les commis dirigés par le directeur des domaines est assez considérable. On peut citer les revenus du domaine royal, c’est-à-dire les droits féodaux des seigneuries appartenant au roi ; des droits d’enregistrement, c’est-à-dire le droit de timbre, taxe perçue sur les actes publics, et le contrôle des actes des notaires ; des droits de mutations sur les propriétés ; les droits de justice consistants en des amendes, confiscations… S’ajoute à cela la régie des droits de franc-fief, une taxe perçue depuis le Moyen Âge sur les roturiers propriétaires de biens nobles, qui, en échange, n’étaient pas soumis au service militaire.

Fig. 7 : Cachet de la ferme des domaines aux armes de France utilisé par François de Frézals

François de Frézals exerce donc une fonction importante qui peut être assez lucrative, car plusieurs directeurs des domaines sont devenus ensuite fermiers généraux. Les directeurs reçoivent un traitement qui leur permet de vivre confortablement et les assimile aux élites nouvelles. Cependant le niveau de richesse de Frézals ne lui permet pas d’être indépendant financièrement et de rejoindre sa femme. Mais il n’est pas dans la gêne. S’il gronde sa femme pour une lettre dont elle aurait pu éviter les frais de port ou la félicite pour les économies qu’elle réalise, c’est par souci d’une bonne gestion financière plutôt que par nécessité.

Frézals n’est pas à proprement parler un fonctionnaire, mais il agit au nom du roi et à ce titre son travail est contrôlé par l’administration royale. Il se trouve donc soumis au contrôle du représentant local de l’exécutif, l’Intendant de Languedoc qui réside à Montpellier, ou son subdélégué de Toulouse. Il est également soumis au contrôle financier de la Cour des comptes et des aides de Montpellier. Mais c’est aussi un employé des Fermes générales. C’est pour cette raison qu’il se montre inquiet de la tournée d’inspection du fermier Jort de Jolibois, auquel il doit présenter sa comptabilité.

Les lettres

Seize lettres sont conservées, couvertes d’une écrite soignée et régulière, ayant conservé pour la plupart leur adresse et leur cachet de cire rouge. Leur état de conservation est bon même si le papier est bruni par endroit par l’humidité.

François de Frézals scelle ses lettres avec trois cachets différents. Le premier qu’il emploie est celui qu’il utilise à titre professionnel : il porte la légende « Ferme des domaines » et les armes de France[13] (fig. 7). Le second est un cachet personnel armorié, sans doute le sien ou celui de sa famille car il l’utilise pendant plus de trois mois et demi[14] (fig. 8). Le dernier est un cachet personnel portant un monogramme constitué de ses initiales[15].

Fig. 8 : Cachet aux armes présumées de François de Frézals

Les relations entre les deux époux constituent bien sûr le thème dominant des lettres. François se montre très amoureux, attentif à la santé de Louise. Il lui envoie des cadeaux : de la soie et de la mousseline nécessaire à sa passion : la confection de tapisserie ; des mouchoirs en indienne, des sirops et confitures aux vertus médicales. Il l’appelle par différents petits noms : « ma chère amie », « mon monstre », « ma marmotte ». Cependant le ton qu’il emploie diffère d’une lettre à l’autre. Dans sa lettre du 7 novembre 1740 il se montre en amant inquiet de la fidélité de sa femme. Il faut dire que les habitants de l’hôtel de Condé ne montrent pas l’exemple. La jeune duchesse de Bourbon, délaissée par son vieux mari qui lui préférait la comtesse d’Egmont, avait noué une relation avec un jeune marquis[16]. Frézals a sans doute eu des échos de cette affaire. Dans sa lettre du 17 juin 1741, il emploie au contraire un ton paternaliste, sermonnant sa femme sur la façon dont elle se soigne, en récitant les lieux communs sur la faiblesse du sexe féminin. Dans la suivante, il prend un ton libertin ou érotique, teinté d’un peu sadisme. Dans sa dernière lettre c’est un ton galant et poétique qui domine. Il y compose deux poèmes dédiés à sa femme à l’occasion de sa fête, où l’amant et le favori prennent le pas sur le mari. D’une manière générale, le sentiment qui domine ces lettres est celui du manque de l’être aimé. La séparation lui pèse de plus en plus.

La famille et les relations apparaissent aussi dans ces lettres. Frézals présente régulièrement ses respects aux parents, au frère et aux cousins de Louise. Il évoque son frère puîné, la naissance de ses deux enfants, mais jamais le souvenir, forcément douloureux, de leur mort en bas âge. Les Egmont et Condé apparaissent comme une famille élargie. Il donne des nouvelles de la famille de Chevreuse, demande souvent des nouvelles de Madame d’Egmont et se préoccupe de la santé de la princesse Caroline surnommée Ocrine. Celle-ci apparaît comme de santé fragile. Frézals évoque sa maladie dans sa lettre du 8 juin 1738. Dans la lettre du 6 janvier 1741, il se réjouit du fait que Louise est secondée par une garde-malade au chevet de la princesse[17]. Et une partie des sirops et confitures qu’il envoie à Louise semble destinée à la princesse.

Les financiers constituant ses relations de travail apparaissent également régulièrement. Les fermiers généraux, ses supérieurs, sont souvent source de soucis. C’est pourquoi il les apprécie peu : il surnomme De Neuville Machiavel et traite Jort de Fribois de suffisant. Il entretient en revanche de bonnes relations avec ses collègues, directeurs des domaines de Montpellier et de Montauban. En revanche il parle peu de ses subordonnés : il se dit prêt à renvoyer son valet s’il ne convient pas à Louise.

François de Frézals s’intéresse aussi à la politique et particulièrement aux menaces de guerre qui peuvent avoir des conséquences financières. Il rédige sur ce point un mémoire qu’il veut soumettre au duc de Chevreuse, puis à Madame d’Egmont. Sans doute cherche-t-il par ce moyen à trouver un emploi qui le rapproche de sa femme.

Fig. 9 : L’Église Saint-Jacques, lieu de sépulture de François de Frézals ( à droite), séparée de la cathédrale Saint-Étienne par un cloître. Extrait du Plan de Tolose, par Albert Jouvin de Rochefort, vers 1678. (Archives municipales de Montpellier).

Mais il n’en aura pas le temps. En effet, François de Frézals décède à Toulouse le 7 septembre 1741, âgé de quarante-cinq ans, deux semaines après avoir rédigé sa dernière lettre. Le lendemain il est inhumé dans l’église Saint-Jacques, annexe de la cathédrale Saint-Étienne[18] (fig. 9). Quelques jours après le subdélégué de Toulouse qui représente l’intendant de Languedoc appose les scellés sur ses biens et registres, décision confirmée par un arrêt du Conseil d’état du 20 septembre[19]. Il était en effet d’usage d’apposer les scellés pour les employés des fermes maniant les deniers royaux. Ceci afin de procéder à l’inventaire puis au solde des comptes sous le contrôle, ici, de la cour des Aides de Montpellier. On ignore ce que devint la succession[20]. Quant à Louise de Larzillière, après la mort de son mari et de sa maitresse, elle reste à l’hôtel de Condé. Elle se remarie en 1746 avec un proche de la famille d’Egmont : Louis Sulpice Petit de Champlain, ancien officier de dragon, capitaine des chasses de la Madame la comtesse d’Egmont qui est présente au mariage[21]. C’est dans leur descendance que sont conservées ces lettres[22].

Édition

Principes d’édition :

L’orthographe et la ponctuation des lettres ont été respectées, à l’exception de quelques majuscules. Les passages restitués entre crochets autres que les indications en italiques correspondent à des lacunes consécutives au décachetage des lettres.

1

[Adresse au dos :] A Mademoiselle. Mademoiselle de Larzillière chez Madame Loiseaux[23] en la maison de M. de St. Aignan[24] caissier des Etats de Bourgogne rue de Tournon faubourg St Germain a Paris.

A Montpellier ce 3e mars 1732

Mademoiselle

Ce seroit ce me semble manquer à la bienseance de négliger de vous faire des offres de service dans cette province ; aprés avoir quitté Paris sans avoir pû prendre de vous mon audience de congé : je vous reitere donc les mêmes offres que je vous ay faites d’être icy vôtre commissionnaire : je sçay que vous aimez le travail de la tapisserie, et que par consequent il vous faut des soyes ; ainsi vous pouvez m’employer car je suis icy dans le centre des meuriers et des vers a soye[25]. A l’egard des liqueurs et du sirop de capillaire[26] je ne vous en offriray pas, mais je prendray mon temps pour en envoyer a M. vôtre frere : ces sortes de choses sont plus du ressort des hommes que des dames. On m’avoit tant vanté la beauté et la vivacité des languedociennes, que je n’ay pas êté étonné d’en voir d’aimables ; je ne sçay si elles me feront oublier Paris, en tout cas c’est une entreprise digne d’elles, car je la crois trés difficile pour l’execution : en homme prudent je me suis precautionné contre leurs charmes, et j’ay des ressouvenirs de Paris que les anges ni les demons les plus adroits ne pourroient pas éffacer ; comme je ne vous crois pas fort propre a joüer le rolle de confidente, je n’auray pas la temerité de vous prendre pour la mienne ; je ne vous manderois cependant que des choses édiffiantes, car en fait de sentiments je suis d’une si grande circonspection, qu’une lettre de 6 lignes si froide qu’elle soit ne laisse pas de me satisfaire : je suis un second don Quichotte : voila bien assés de fo[lies], je reprends le ton serieux p[our] vou[s proposer] encor mes services et vous asseurer que l’on ne peut rien ajouter aux sentiments pleins de respect avec lequel je suis

Mademoiselle

Votre trés humble et trés obeissant serviteur.

Frezals

2

Fig. 10 : Vue des sources de Forges-les-Eaux en pays de Bray où Louise a certainement accompagné sa maîtresse la princesse de Condé. Dessin de Louis Boudan, 1696. (Bnf Gallica). On y voit des carrosses déposer des personnes de qualité venus boire aux fontaines.

[Cachet de la poste au dos :] De Toulouse

[Adresse au dos :] A Madame. Madame Frezals a l’hotel de Condé a Paris.

A Toulouse le 8 juin 1738

Tu trouveras, trés chere amie, un mèmoire cy joint au sujet des affaires qui pouroient avoir lieu si la guerre s’alumoit ; tu le feras communiquer a M. de Flesselles[27] et a M. Hermasn[28] (?), même a M. l’avocat[29], a fin de sçavoir si leurs idées s’accordent avec les miennes, et pour agir en consequence. J’imagine en cas que la guere soit seure, qu’un bon de M. le controlleur general, est ce qu’il y a de meilleur.

C’est aujourd’hui le 27e jour que tu ès accouchée, si tu n’as point eprouvé d’accident tu dois estre assés bien ; cependant il faut te menager trés soigneusement jusques a ce que les forces soient bien revenues et qu’il n’y ait absolument rien a craindre. M. Beauclair[30], mon frere et plusieurs autres personnes m’ont mandé que tu estois autant bien que tu pouvois l’estre ; cependant je n’ay point reçû de nouvelles de la chere mere, quoyque je luy eusse ècrit ; mandes moy si j’ay quelque ceremonial a remplir, et si sans le scavoir, je n’aurois pas faché contre moy ; comme c’est la 1ère fois que je suis Pere, je ne suis pas fort au fait des points et des virgules, mais si j’ay peché de ce côté la, je ne peche seurement pas du côté du cœur et des sentimens.

Donnes moy des nouvelles de ton frere[31], il y a longtems que je n’en ay eu, juge t’il beaucoup, a t’il condamné a mort ? a t’il forcé des garçons d’epouser des filles ? Enfin s’amuse t’il un peu ?

Mille et mille amitiés au Cousin et a la Cousine ; le Cousin s’est un peu diverti de moy dans sa derniere, tu devrois pour me venger luy faire quelque niche[32].

Je joins icy un mémoire pour montrer a Madame d’Egmont[33], si la chose luy convenoit j’amerois autant qu’elle en profita que M. de Chevreuse[34] a qui j’avois dessein d’en donner l’idée.

On dit que la Princesse[35] va toujours fort mal, cela tire furieusement en longueur, et sans doute qu’on sera hors d’etat de profiter de la derniere ressource de la medecine, la prise des eaux[36].

M. le duc de Richelieu[37] a fait icy une entrée royalle, les rues tapissées, un dois porté devant luy, la bourgeoisie sous les armes, des compagnies a cheval, 50. gardes 100. cavaliers de la marechaussée. Tout cela étoit fort grand et l’on trouve qu’il soutien fort bien toute cette grandeur, par encor plus de hauteur.

Ne me donnes de tes nouvelles que quand tu seras absolument bien remise et que l’envie et la force de recommencer t’aurons repris tout de bon, en attendant sois certaine que je t’adore.

Tu me donneras des nouvelles de ton fils.

3

[Adresse au dos :] A Madame. Madame Frezals a l’hotel de Condé a Paris.

A Lyon le 31 octobre 1740

Lundi au soir.

Je suis arrivé, chere amie, en bonne santé et bonne compagnie ; je me suis dissipé autant que je l’ay pû, mais j’avois des retours de reflexions, qui m’attristoient et dont vous etiez la cause, ces reflexions ne me quitteront pas plus a Toulouse qu’en route, cependant je me forme des tableaux consolans pour l’avenir et l’Esperance de nôtre prochaine reunion, me fait endurer plus patiemment une absence, qui m’éprouve plus sensible, que tout autre evenement de ma vie. Excepté le jour ou nous nous sommes asseurés l’un de l’autre, il ne peut m’en arriver de plus beau que celuy ou je te reverray.

Je compte trouver de tes nouvelles a Montpellier, ne me laisse pas dans l’incertitude sur ton etat. Tu dois me connoitre, et ne pas douter, que je n’abandonnasse tout, si j’avois lieu de craindre quelque chose sur ta santé. Ne te fatigue pas trop, conserve toy pour tes parents, pour tes amis, et plus encore pour moy. Tu le dois par les sentimens de tendresse et d’estime que je t’ay voué, et qui ne finiront qu’avec ma vie. Je suis un peu fatigué, je vais cependant ecrire a Vieuxmaison[38] et la poste me presse. A Dieu chere amie menage toy, et aime moy autant que je t’aime. Rapelles moy au souvenir du chere Pere et de la chere Mere et surtout de tes nouvelles. Je t’embrasse de tout mon cœur.

4

[Adresse au dos :] A Madame. Madame Frezals a l’hotel de Condé a Paris.

[Cachet de cire aux armes de France de la Ferme des domaines]

Figure 11 : cachet de la Ferme des domaines aux armes de France, utilisé par Frézals

A Montpellier le 7 novembre 1740

En arrivant icy hier, chere amie, j’ay reçû ta lettre du 29. du mois passé, je ne sçaurois t’exprimer combien ma satisfaction a êté parfaite, d’apprendre par toy même, l’Etat ou tu te trouves. Je n’aurois eu rien a desirer, si tu ne t’etois pas affligée de mon départ ; tu sçavois bien qu’il falloit nous separer, et j’aurois souhaité de tout mon cœur, que tu eusses autant pris sur toy, que je le fesois moy même. Tu conçois bien que j’ay souffert, et que cette separation m’a touché terriblement, mais mon 1er soin a toujours êté de ne pas t’atrister, et de tacher de te consoler, lorsque moy même j’avois le plus besoin de consolation. Si j’êtois bien seur que tu n’as êté deraisonnable que ce jour et le lendemain de mon depart je te le pardonnerois m’ais j’aprehende que tu ne me trompe, et comme je t’ay veu pleurer la veille, tu pourrois bien en avoir fait autant le surlendemain. Je ne veux pas que tu m’en fasse acroire sur ta santé, sur tes peines, ni sur tes occupations, parce que si j’avois lieu de douter de la verité de ce que tu me marque, je serois dans une incertitude affreuse ; ainsi ce seroit moins me consoler, que m’affliger. Fais m’en accroire, si tu veux, sure de certains plaisirs, a la bonne heure, pourveu que je l’ignore, tu me verras toujours le même, mais je serois different si je le scavois ; de ma part, je te cacheray mes infidelités, et nous pourrons vivre politiquement sur cet article. Je ne te feray point d’aveux indirect, et sans doute que tu serois assés prudente pour en user de même. Ton confesseur est cordelier, partant connoisseur, tu peux t’en raporter a luy, un cordelier sur ce point a sa reputation a conserver et n’est pas capable de tromper. C’est assés badiner. J’ay donné ta soye a Lyon et les instructions suffisantes pour la mettre en œuvre. J’ay donné ton mémoire pour la mousseline et tu l’auras comme tu la souhaite. Je vais faire une caisse de sirop de capillair a la fleur d’orange, j’y joindray du sirop de grenade et de limon. Tu presenteras cela à S.A.R.[39] Je vais donner des ordres pour avoir des confitures d’azerolles[40], tu scais l’usage qu’il en faudra faire. Je te feray passer une lettre de change de 500 livres par le 1er courrier. L’amy Vaslet prendra 200 livres et te rendra mon billet, tu garderas le surplus. Adieu chere amie, donne moy de tes nouvelles, et sois seure que je t’aime mille fois plus que moy même.

Embrasse le cher Cousin, c’est un garçon de merite et je me fais honneur de compatir avec luy par le caractere et les sentiments.

Mille amitiés a la grosse Cousine ; ne m’oublie pas auprés du cher Pere et de la chere Mere. Mes complimens au cher frere. Je t’embrasse de tout mon cœur.

5

[Adresse au dos :] A Madame. Madame Frezals a l’hotel de Condé a Paris.

A Montpellier le 9 novembre 1740

Je suis encor icy, chere amie, pour quelques jours, et je ne compte d’estre a Toulouse que mardy prochain. J’y trouveray sans doute de tes nouvelles. J’ay recu toutes sortes de marques d’amitié de mes connoissances en cette ville, et l’on m’a complimenté sur ton bon esprit et ton charmant caractere, M. de Nigry[41] a dit partout mille biens de toy ; s’il n’a fait ton eloge que sur les qualités de l’ame, c’est qu’il a cru que je devois le faire sur les qualités du cœur. Plus j’ay lieu de t’estimer, et plus je ressentirois vivement les alterations de ta santé, tu ne sçaurois trop la menager, si tu m’aimes autant que je m’en flatte ; je dois souhaitter de vivre longtems avec toy, puisqu’il est bien certain que je ne seray jamais le mary d’une autre, quelqu chose qui m’arrive. As-tu vû l’amy Vaslet[42] ou M. de Flesselles, tu me feras plaisir de me donner de leurs nouvelles. Quand M. Ramond[43] passera a Paris, taches de scavoir si l’on croit ou non la guerre. Vois de tems en tems M. de Neuville[44], M. de Bourgogne[45] et M. Landry[46]. Il faut que tu me serves de solliciteur, tu le dois si tu souhaites d’avoir prés de toy le plus fidele des amis, et celuy qui t’aime et te respecte le plus.

Je t’ay fait part de la proposition que M. Chaponel[47] m’a faite de passer à la direction des Domaines franc fiefs et amortissemens de Bretagne, parles en a M. de Flesselles, et prie le de me degager de toutes sollicitations la dessus, d’autant que Province pour Province il vaut mieux que je reste ou je suis que de passer ailleurs.

Pramont[48] et sa femme m’ont fait mille amitiés ; il veu se restituer a Paris, mais si sa santé qui me paroit delabrée, ne le force pas a quitter avant la fin du bail[49], il tiendra jusques la.

Demandes a M. de Champlay[50] s’il veut du londrin ecarlate et combien.

Des complimens a tous nos amis. Ne m’oublies pas auprés du cher Pere et de la chere Mere. Tu connois tous mes sentimens pour toy trés cher amie.

6

A Toulouse le 17 novembre 1740

A mon arrivée icy, cher Amie, j’ay trouvé deux lettres de toy, j’y comptois je n’ay pas êté trompé dans mon attente. La 1ere. est du 5. de ce mois et la seconde est du 9. 8bre. Comme je ne suis parti que le 27 tu pouvois me la remettre, ç’auroit êté 7 sous d’epargné sur les postes. Ne crois pas cependant que je me plaigne et qui m’en coute pour avoir de tes nouvelles, je ne suis point assés dupe pour mettre en comparaison de pareilles bagatelles, avec le repos que je perdrois, si tu ne m’ecrivois pas. Au surplus j’imagine qu’en dattant ta lettre d’octobre, tu sous entendois novembre, et le contenu de cette lettre prouve que tu radotois ; tu t’es aperçüe, dis tu, qu’il t’arrivoit d’avoir de l’humeur et que si j’avois sçu la peine que je te fesois en te contrariant, je m’en serois abstenu. Tes lumieres sont sans doute superieures aux miennes, ou je t’aime assés pour ne te trouver aucun deffaut, je te proteste que ton humeur m’a paru charmante, et que si j’ay quelque fois badiné, ce n’êtoit que pour t’amuser et dans la confiance ou j’êtois sur ton bon esprit ; tu ne me persuaderas jamais, que mes plaisanteries te fissent de la peine, a moins que tu ne me prouve que je ne t’aime point, et c’est precisement ce que tu ne pourras jamais faire, puisqu’il n’est asseurement rien au monde que j’aime, que j’estime et que je respecte autant que toy. Le respect paroitroit un peu fort aux maris ordinaires, mais pour m’en justifier, il suffiroit qu’ils fussent a portée de connoitre comme moy toutes ses bonnes qualités. La froideur dont tu m’accuses, me sembleroit un deffaut bien insuportable, si tu pouvois t’en plaindre ; je ne suis point caressant, je l’avoüe, mais que servent les demonstrations exterieures, quand on est seure du cœur et des sentimens ; doutes tu de moy sur ces deux points, et que faut il que je fasse pour te convaincre que je n’aime que toy, et que tu possedes mon Cœur et ma pensée uniquement. Au nom de Dieu ne me fais plus de ces sortes de reproches, ils m’inquietent et me font douter que tu me rendes la justice que tu me dois. Je sacrifierois une pinte de mon sang, pour me rejoindre a toy, je compte toujours que notre separation ne sera pas longue, et cette esperance est ma seule consolation. Sois seure que je prendray garde a mon valet et que je m’en deferay s’il s’ecarte de ses devoirs, je le renverray même dés son arrivée, si tu me marque que tu le souhaittes, tu peux t’en expliquer naturellement. Un de mes amis te porteras incessamens une douzaine des plus beaux mouchoirs qu’il y ait eu a la vente de L’orient[51], j’en aurois eu 8 livres de chacun si j’avois voulu les ceder, je voudrois qu’ils valüssent 1000 fois plus, je n’en aurois que plus de plaisir a te les offrir ; la meme personne [la suite se trouvait sur un autre feuille qui n’est pas conservée].

7

A Toulouse le 6 janvier 1741

Je n’ay point voulu, chere amie, aller a la comedie ce soir, pour ne pas me priver d’un plaisir plus parfait, c’est à dire de m’entretenir avec toy ; je le gouterois bien mieux teste a teste, et je t’avoue que je commence a concevoir que suporterois trés impatiemment une longue absence ; mes occupations ne prennent rien sur mes sentimens pour toy, il me semble qu’ils deviennent chaque jour plus vifs, je t’aime au dela de toute expression, et cependant je crains toujours de ne pas t’aimer autant que tu le merites ; je ne desire qu’une seule et unique chose dans ce monde, c’est de te rendre heureuse, c’est de meriter ton estime, et de te forcer de convenir que tu m’aimes encor mieux mary, que tu ne m’aimois avant. Tu ne scaurois plus voir rien de nouveau en moy, tu connois tous mes deffauts, tu scais que je suis mauvais joueur, vif, impatient, mais tu scais aussi que ce qui domine le plus dans mon Cœur, c’est l’amour que j’ay pour toy, et ta generosité, te fais fermer les yeux sur ce que je peux avoir de desagreable en faveur de l’empressement extreme que j’ay de te plaire.

J’ay apris avec plaisir que S.A.R. a pris une garde, et que tu te fatigues moins, j’aprendrois plus volontiers la parfaite guerison de la Princesse ; je la souhaite de tout mon Cœur et je fais pour la durée de ses jours, les vœux les plus sinceres. Mais je ne me lasseray point de t’engager a ne point te fatiguer, a prendre garde a tes escaliers[52], je t’avoue que ces escaliers m’ont dèja donné bien des inquietudes, et qu’ils me reviennent a l’esprit toutes les fois que je n’ay pas de tes nouvelles. J’ay cru que tu macquitterois des devoirs de bonne année auprés du cher Pere et de la chere Mere, tu conçois bien que je leur ecrirois asseurement très volontiers, et que c’est pour ne point multiplier les lettres inutilement que je ne l’ay point fait, je leur suis autant attaché que toy meme, je connois leur bon cœur et tous leurs sentimens, et je conserveroy toute ma vie la reconnoissance la plus vive du don precieux qu’ils m’ont fait ; je voulois ecrire a ton frere, mais je n’aurois pas mis un mot pour l’oncle ni pour la tante[53] et cela auroit pu se prendre en mauvaise part. Je me suis privé de cette satisfaction par raport a toy, ainsi acquittes moy auprés de ton frere. Il me semble que les affaires de l’Europe visent a la guerre, les pretentions de la Maison de Baviere[54], les troupes que le Roy de Prusse fait passer en Silesie[55], celles qu’on que le roy d’Espagne va faire passer en Italie[56], la nouvelle revolution de Russie[57], enfin l’election d’un Empereur, sont des circonstances assés fortes pour faire presumer, qu’elles ne se developeront pas sans faire bruler de la poudre.

Tu me feras plaisir de ne pas voir M. Laurés[58], j’ay recu de luy une lettre impertinente, et pour laquelle j’aurois parlé a ses epaules si j’avois êté plus prés de Paris ; c’est un faquin pour ne rien dire de plus, et je me souviendray longtems de son impertinence. M. de Flesselles te dira ce dont il est question.

Je ne te repons point de me priver longtems de l’oraison de St. Julien[59], si tu me laisse toujours icy, mais si je dis cette oraison ce ne sera jamais qu’auprés de toy, soit que tu viennes soit que j’aille ou tu és, ce que j’aimerois beaucoup mieux. Mande moy si tu as l’air raisonnable avec ton ventre. A Dieu Mon Monstre.

8

[Adresse au dos :] A Madame. Madame Frezals a l’hotel de Condé a Paris.

A Toulouse le 11 avril 1741

Puisque mes lettres, cher Amie, ne t’ennuyent pas, je t’en ecriray souvent, mais je crains que si ma correspondance, te fatigues quelque jour, tu ne regardes mon exactitude comme une trés mauvaise habitude ; cependant je ne veux point me faire de peine prematurée, et je ne plais a croire, que je ne te donneray pas lieu de changer. Je souhaite bien vivement d’estre rejoint a toy, mais j’aurois une peine infinie, a me soumettre a la condition que tu passerois fidelement ; je n’ay pas tan[t] de force que cela, et je ne scay qu’[une] seule et unique consideration qu[i] pût me retenir, ce seroit le tor[…] que cela pourroit faire a ta tante. Au reste es tu bien seure qu’il ne manque rien a ton enfant, prends y garde, l’affaire est serieuse, et si tu presumois qu’il pût seulement luy manquer un cheveu, il faudroit songer a le faire, et tu as dans ton voisinage de grands faiseurs. Tu n’en aurois pas besoin, si j’etois plus a portée.

J’ay sur ma table une lettre depuis plus d’un mois pour M. Malibran[60], je ne l’ay pas envoyée faute de scavoir l’adresse, juge de mon esprit par la. Au surplus je luy mandois ce que je t’ay mandé, que si j’etois a Paris je verrois pour luy M. Gilbert de Voisins[61], mais que je ne suis pas dans l’usage de luy ecrire. Fais luy mille complimens.

Je n’ay point du tout oublié M. Morette[62], mais la dame dont il veut scavoir des nouvelles, est mariée avec un conseiller au senechal, ni riche, ni pauvre, elle se porte bien, elle n’est plus jolie, et a plusieurs enfans au surplus elle vit bien avec son mary. En rendant cela dis a M. Morette que s’il me fournissoit des occasions de luy marquer attachement, j’en profiterois avec grand plaisir.

A l’egard de M. de Montjuif[63] si la chose est difficile, n’en parle pas. Je ne voudrois pas pour cela employer Madame d’Egmont.

J’ay recu une lettre de mon frere[64] avec la tienne, je ne scaurois luy repondre par ce courrier, remercie le pour moy et dis luy que je recevray toujours de ses nouvelles avec plaisir. Vous ne me dites rien ni l’un ni l’autre [de] Mr. L’abbé defroqué[65].

Donne moy regulierement des nouvelles de la chere Mere, j’apren[d] avec peine, qu’elle n’est pas tout a fait remise, et je te demande en grace de ne pas me tromper la dessus. Menages toy bien et ecris moy le plus souvent que tu pourras.

9

Fig. 12 : Début de la lettre du 15 avril 1741

[Adresse au dos :] A Madame. Madame de Frezals a l’hotel de Condé a Paris.

A Toulouse le 15 avril 1741

J’avoüe, Madame la railleuse, que j’ay lieu d’estre extremement satisfait de vos procedés ; boire a la santé de son mary avant de se coucher et luy ecrire en se levant, pourveu qu’on ait passé la nuit seule, sont des choses admirables, et qui sembleroient incroyables, a bon nombre d’epoux, qui ne sont dans l’habitude de se rappeler leur hymen, que quand ils veulent s’ennuyer ; en cecy, sans vous deplaire, les epouses sont comprises aussi. A ce propos il est bon de vous observer, que quand on traite en general d’une même espece, sous la dènomination la plus noble, on comprend celle qui l’est moins, ainsi quand on parle de l’homme generalement, la femme est sous entendue, comme êtant fort inferieure a notre espece. Je ne scay si c’est la du Picard[66], en tout cas, mes compatriotes ne doivent point s’en affliger, puisqu’on trouve de ce Picard la, dans l’ancien et le nouveau testament, dans St. Paul, dans les Peres de l’Eglise, dans tous les sermonnaires, et dans le cœur de tous les hommes. Mais vous autres femmes vous vous connoissez si peu en Picard, que vous prenez pour injure, les choses les plus flatteuses ; on veut vous exprimer qu’il n’est point de precautions, qu’on ne prit, pour joüir sans cesse de vos faveurs, et vous attribuez cette idée a misere, c’est asseurement prendre mal les choses, ou ne pas les entendre, et si les Parisiens ont toujours autant d’esprit, j’aime mieux, mon Parler rester Picard. Tu parles dèja de ton enfant comme si tu êtois mere, cela s’apelle se donner des aises de bonne heure, mais je te passeray toujours avec grand plaisir tout ce qui me paroitra de bonne augure ; si j’en crois les nouvelles que j’ay toujours recues, ta grossesse a êté trop heureuse pour que l’accouchement ne le soit pas, je t’avoue que je l’attends avec une vive impatience et que je n’ay que toy pour objet de mes inquietudes. Tu as bien fait de recevoir une nourrice de bonne main et a portée de Paris.

J’ecris a mon pere pour l’engager a estre Parain, nous verrons sa reponse.

Le fermier[67] en tournée est devenu amoureux de M. du Chassin[68] directeur a Montpellier et celuy cy me paroit fort reconnoissant ; ils paroissent faits l’u[n] pour l’autre. Ce même fermier a laché des impertinences sur mon compte a mon frere, il m’a même fait l’honneur de m’en ecrire. Je crois que le parti du mèpris est le plus raisonnable, en attendant qu’une occasion favorable me mette en situation de marquer reconnoissance. Ce fermier est un suffisant, et un ignorant. Au surplus ne dis rien de cela, je m’ennuye de me plaindre. Aime moy toujours cela me tiendra bien de tout.

Mille respect a la chere Mere et au cher Pere s’il est de retour. J’ecriray a Bonefaux[69]. Mille amitiés au Cousin et a la Cousine. Je boiray a vous avec M. Godefroy[70].

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[Cachet de la poste au dos :] De Toulouse

[Adresse au dos :] A Madame. Madame Frezals a l’hotel de Condé a Paris.

A Toulouse le 29 avril 1741

J’aprens toujours avec un empressement nouveau, que ta santé ne s’altere pas, ma chere amie, et tu peux compter que c’est la plus parfaite de toutes les satisfactions pour moy. J’aurois eu quelque inquietude sur les etouffemens dont tu m’entretiens, si t’on êtat ne les rendoit pas pour ainsi dire necessaires, mais il faut que tu ayes attention d’estre presque assise la nuit, et de n’estre jamais seule ; tu ne sçaurois trop te menager, puis qu’independement de ta propre conservation, tu dois songer a moy, et connoissant mes sentiments, tu dois sentir l’affreuse scituation ou tu me jetterois s’il t’arrivoit quelque chose de facheux. Quand tu ne pourras point m’ecrire, pries quelqu’un de le faire je t’en conjure, je me passeray fort bien des longs details, pourveu que je sache de tes nouvelles se seray content. Tu vas estre bientot libre, je crois que le terme aproche. Cette scituation n’est point dangereuse pour les personnes raisonnables, et qui scavent se contraindre, il ne faut qu’une bonne conduite pour s’en tirer heureusement, et c’est cette conduite que je te recommande sur toutes choses. Nous allons avoir un nouveau motif de nous aimer encor plus tendrement, mais comment pourrois tu gagner quelque chose sur un cœur que tu possedes si parfaitement.

J’ay escrit a mon Pere, il nommera quelqu’un pour le representer c’est ce que nous verrons, tu peux luy ecrire aussi, fait cependant ce que tu voudras. Tu m’as fait grand plaisir de me donner des nouvelles de la cher Mere, elle est aprés toy ce que j’aime le mieux au monde. Je diray a Madame de Chevreuse[71] ce que tu me mandes, cette dame se porte bien, ainsi que M. le duc[72] et M. l’eveque de Bayeux[73].

J’ecris a mon frere, sur M. l’abbé Descoleté[74], peut estre ne sera-t-il pas content de ma lettre, mais je dois songer a moy, j’ay trop longtemps songé aux autres.

A Dieu Marmotte, aime moy bien, je t’adore et je te promets un autre enfant le plus tot que je pourray aprés celuy cy. Donnes moy de tes nouvelles. Dis ou fait dire a M. de Bourgogne que j’auray l’honneur de luy ecrire incessament mais que M. de Fribois[75] m’occupe. Le fermier est doux et je le verray venir.

J’ai remis ta mousseline a M. de la Hayes[76] parent de M. de Neuville, et mon amy, si tu es en etat de diner avec luy tu me feras plaisir de l’y engager.

11

[Cachet de la poste au dos :] De Toulouse

[Adresse au dos :] A Madame. Madame Frezals a l’hotel de Condé a Paris.

A Toulouse le 1er may 1741

Notre carriere, ma chere amie, est bien malheureuse, puisque les choses que nous regardons comme le plus parfait bonheur, sont accompagnées des chagrins les plus vifs et les plus amers. Tu connois mes sentimens pour toy ; eh bien mes inquietudes sur ton etat sont de la même force, et plus je te sens prés du terme, moins je suis raisonnable ; enfin je suis si ridicule sur cela, qu’il me semble que je serois plus heureux, si nous êtions encore libres ; juges de ma scituation et plains ma foiblesse. Je scay fort bien qu’en te menageant il n’y a rien a craindre, mais je suis absent, et il me semble a chaque instant, que je te vois monter ou descendre et qu’un faux pas te causes un accident ; bref j’ay des transes perpetuelles. Je compte d’avoir aujourd’huy de tes nouvelles, au nom de Dieu, fais m’en donner regulierement quand tu ne le pourras pas toy même, et ne t’avises pas aprés tes couches de m’ecrire trop for, parce que cela me chagrinera encor plus que le silence.

M. de Fribois s’est expliqué cordialement avec moy, et je luy ay rendu sincerité pour sincerité, c’est un fort galant homme et je voudrois qu’il restat longtemps icy ; je luy ay montré le ridicule de la correspondance et la mauvaise regie de Moncrif[77], et cela par preuves. Je l’ay fait entrer dans le detail de ma regie et il m’en paroit très content, il a pris des exemplaires de nos instructions et lettres circulaires, et il voudroit que les directeurs qui m’avoisinent les eussent. A son retour tu verras ce qu’il pense, et s’il m’a trouvé tel qu’on m’a depeint.

Mes respects a la chere Mere ; M. et Madame de Chevreuse se portent bien. Donnes moy de tes nouvelles, et plains ma scituation, autant que je prends part a la tienne. Mille amitiés au Cousin et a la Cousine.

12

[Cachet de la poste au dos :] De Toulouse

[Adresse au dos :] A Madame. Madame Frezals a l’hotel de Condé a Paris.

A Toulouse le 7 mai 1741

La derniere de tes lettres, chere Amie, m’annonce que tu as êté saignée, et je n’ay plus reçu de tes nouvelles, tu dois bien imaginer que cela m’inquiete beaucoup ; ne m’ecris que deux mots, ou fais ecrire quelqu’un pour toy, et que je ne passe point de semaine sans recevoir quelque lettre qui m’annonce l’etat ou tu te trouves ; n’y manques pas je t’en conjure, cela me feroit souffrir, et je ne dois pas croire, que tu prenes plaisir a m’inquieter.

La Princesse de Leon[78] mourut avant-hier d’une fievre putride, et fut enterrée hier.

M. le Duc et Madame la Duchesse de Chevreuse se portent fort bien ainsi que M. l’eveque d’Evreux[79].

M. de Fribois est toûjours icy, je l’ay fait revenir de bien des preventions, et entre nous j’ai peigné Moncrif dans la grande perfection. Je suis fort content de la façon dont M. de Fribois opere, il me paroit estre egalement content de moy et de ma Regie, au moyen de quoy, j’ay lieu de penser que les choses changeront a son retour.

J’ay beaucoup d’occupations, je fais partir aprés demain mes comptes de 1740, et je n’ay pas le tems de t’en ecrire davantage.

Mes respects a la chere Mere et au cher Pere, s’ils sont de retour.

Il y a longtemps que je n’ay de nouvelles de M. de Flesselles, est ce qu’il seroit malade, tu ne m’en dis rien.

A Dieu chere amie, tu ne scaurois m’aimer autant que je t’aime.

13

[Cachet de la poste au dos :] De Toulouse

[Adresse au dos :] A Madame. Madame Frezals a l’hotel de Condé a Paris.

A Toulouse le 16 mai 1741

Ta derniere lettre chere Amie, m’a fait un plaisir infini, j’y trouve a peu prés les mêmes choses sur ta santé, que ce qui me vient d’ailleurs, et j’ay lieu d’esperer que tu sortiras a ton honneur et gloire, de l’embaras ou tu ès presentement. Menages toy bien avant et aprés tes couches, ne te laisses manquer de rien, amuses toy le plus que tu pourras, et surtout ne m’ecris plus, tes lettres me feroient plus de peine encor que de plaisir, et il suffira que le cousin Beauclair[80] et quelqu’autre personne me donnent regulierement de tes nouvelles. Tu ne scaurois croire combien je suis inquiet, il y a des momens ou je sacrifirois tout pour estre auprés de toy, il y en a d’autres ou je trouve de la consolation a n’estre point a portée de te voir souffrir. Cependant j’aimerois mieux estre prés que loin, tu peux adoucir mes soucis en te menageant soigneusement et en recommandant qu’on me donne de tes nouvelles. Mais au nom de Dieu ne m’ecris plus, je vais de mon côté cesser de t’ecrire. Ma correspondance sera avec la chere Mere.

Figure 13 : Ocrine ou Caroline de Hesse-Rheinfels, princesse de Condé. (Tableau d’après Pierre Gobert, musée Condé à Chantilly).

Tu dois bien de la reconnoissance a Madame Chatillon[81], Madame Daigremont[82] et Madame Marchand[83], de la peine qu’elles se donnent de te faire compagnie de tems en tems, asseure les je t’en prie de mon respect et fais leur bien ma cour. Tu ne me dis rien de mademoiselle Ocrine[84], ne t’avise pas de te brouiller avec l’Allemagne, il faut estre bien avec tout le monde, et il faut respecter dans les autres la Patrie de ta Maitresse. La grosse cousine a des compliments de moy dans une lettre que j’ecrivis avant-hier a son seigneur et maitre ; cette pauvre cousine perd bien de ce que je ne suis pas a Paris, pendant tes couches elle auroit eu deux maris.

Il y a bien six semaines que je n’ay eu aucune nouvelle de M. de Flesselles, mais puisque tu le vois quelque fois, et qu’il te temoigne amitié, cela me suffit.

J’ay sçu par M. Ramond[85] luy même ce que tu me mandes de la conversation avec M. de Neuville ; je pense bien qu’une place vacante conviendroit a M. Ramond pour son fils, mais je doute fors qu’il obtint la mienne quand elle viendroit a vacquer, le seigneur Machiavel[86] sçauroit bien luy donner un croc en jambe.

Le fermier en tournée[87] partit hier matin pour se rendre a Montauban, il n’a voulu loger chez aucun directeur, mais il a accepté un logement chez le neveu de M. de Neuville. Sans doute que la qualité de neveu d’un seigneur aussi respectable met un député hors d’etat de trouver a redire aux faits et gestes, et que tout doit paroitre digne d’admiration[88]. Ce deputé n’est pas tel que je l’avois cru, il est juste et fort raisonnable, il s’est conduit comme il a cru le devoir faire et je doute fort qu’on puisse luy rien imputer quand on sera en presence. C’est ce que tu scauras plutôt que moy. Il connoit bien Duchassin mais il vouloit faire plaisir a la veuve Pramont et il en avoit trouvé le moyen sans qu’il en couta rien a la compagnie[89]. Cependant cette compagnie qui croit faire fortune en maltraitant ses preposés de toutes façons, trouve mauvais qu’un associé pense autrement qu’elle. De pareilles gens ne sont bons a servir qu’autant qu’on ne scauroit mieux faire. Je n’etois pas en peine que Duchassin ne pleu point a la compagnie. Il se croit fort habile et ne l’est point. Cependant il seroit superieur a tout autre, si comme celuy de Montauban il avoit l’honneur d’estre neveu de Monseigneur de Neuville. Mes respects au cher Père et a la chere Mere. Le procés de Madame de Chevreuse fut commencé avant-hier. J’ecriray ce qui se passera. A Dieu chere Amie, songes quelque fois a un second toy meme.

J’oubliois de te dire que j’ay l’honneur d’estre separé de M. […] male[90], c’est peut estre le plus mauvais sujet que la [terre] porte, s’il m’avoit paru capable de correction, j’eu [… es]sayé, mais je ne connois rien de pis. Il pressent que [je vais le] renvoyer a Paris.

14

A Toulouse le 17 juin 1741

Par sa lettre du 3. le cher Cousin me mande que tu as pris medecine le matin ; par celle du 5 il m’annonce que tu as une medecine dans le corps, et par celle du 10 il me regale encor de la nouvelle d’une medecine prise le meme jour ; c’est-à-dire que l’ass. des lettres du cousin, concernant ton petit individu, va devenir comme l’article de Versailles dans la gazette de Paris ; tu auras pris medecine et le roy auras entendu la messe. Je suis tenté de croire que c’est une gageure, ou qu’il y a quelque chose qu’on me cache ; parbleu il n’est pas naturel, que par manière de regal, une femme prenne medecine tous les jours. D’ailleurs je ne vois pas quel mal peut faire une couche a l’estomac, si l’on m’annonçoit que le cerveau a souffert, encor passe, on sçait que c’est la partie foible de ton sexe, mais de par tous les Diables, il faudroit pour le retablir de bons consommés, et non pas des medecines. Au surplus en suposant que tu sois voüée aux medecines, je te permets pendant mon absence, d’en prendre tant que tu voudras, pourveu cependant qu’elles ne te fassent point de mal, mais quand s’y seray, je ne te permettray que les remedes, je n’auray pas même besoin d’apoticaire pour te les donner, ils ne les donnent pas du bon côté.

J’ay recu des nouvelles de M. de Flesselles. Je craignois qu’il ne feu excedé des tracasseries que j’ay essuyées et que je dois a son bon amy M. de Neuville, mais je vois qu’il me conserve toujours son amitié et cela me suffit. Rapelles moy quelque fois a son souvenir, et asseure sa femme de mon respect.

Je suis fort flatté des sentiments que M. de Fribois temoigne pour moy ; quand il est arrivé icy, il n’etoit point du tout prevenu en faveur de ma regie et ce n’a êté qu’en luy en rendant un compte exact qu’il s’est desabusé. Je luy ay montré que j’avois fait tous les bons ètablissemens, et que la compagnie elle même êtois partie d’après moy ; il a reconnu de l’exactitude et de la regle partout, et il a bien desmelé que les affaires se deffendoient icy autrement qu’ailleurs. Je souhaite que son raport fasse cesser les injustices, mais j’en doute, êtant bien persuadé que M. de Neuville les aime. Il en fait même de semblables a celles qu’il a imaginées, pour faire briller son neveu que j’ay instruit, et pour me denigrer ; mais le bonhomme n’en viendra pas a bout, et je connois presentement la force ; bref je me suis procuré des sottises de sa façon.

Assure le cher Pere et la chere Mere de mes respects et fait leur pour moy, comme pour toy meme.

Ne t’avises pas de laisser manger mes habits par les vers, et fais avertir Vinere[91] mon tailleur, M. de Flesselles te diras ou il demeure.

Si vous n’etiez pas une impertinente, petite Marmotte, vous m’auriez mandé des nouvelles de la soye que j’ay remise au frere de M. de Bourgogne en passant a Lyon.

Mille et mille amitiés au petit Cousin et a la grosse Cousine, il me paroit que cette grosse Cousine n’est pas devenue plus raisonnable qu’elle étoit, puisqu’elle se bat avec mon frere.

Je te fais mon compliment sur le menage, cependant quand tu auras besoin d’argent Vaslet t’en donnera ; vingt francs ou quarante par mois, sont pour moy choses fort ègales, je trouveray bien le moyen de reparer ces extraordinaires ; et si tu n’as pas de meilleurs raisons pour en demeurer la, je n’auray guere de peine a les combattres. J’imagine même que si j’etois un quart d’heure avec toy, je te prendrois par des endroits si sensibles que tu consentirois a tout. As tu resolu de ne plus me permettre de le faire qu’avec le doigt.

A Dieu Marmotte, j’attens de tes nouvelles, mais j’attendray avec plus d’impatience encor le moment d’être rejoins et de te jurer mille fois, que je seray toute ma vie, plus a toy qu’a moy même.

Quand tu le pourras il faudra voir M. de Fribois.

15

[Cachet de la poste au dos :] De Toulouse

[Adresse au dos :] A Madame. Madame Frezals a l’hotel de Condé a Paris.

A Toulouse le 27 juillet 1741

N’avez-vous rien a faire dire a votre mary ? Force sottises m’a-t-elle dit. Ce sont les propres termes de votre cousin dans sa lettre du 17 de ce mois, et pour que votre petit cerveau ne soit pas perplex, c’est en vous promenant au Luxembourg, que vous avez fait cette reponse, et vous la fites sur ce que l’on vous demandoit, ce que vous voulez qu’on me dit de votre part. Trouvez vous cela clair ? Parbleu je vous admire ! Oh je vous aprendray a respecter en moy, premierement la virilité et la force, secondement la prudence et la raison, troisiemement l’age et l’experience, quatriemement l’Empire et la souveraineté de mary, cinquiemement l’Image de Dieu. Je ne finirois pas si j’entreprenois de vous rappeler tous vos devoirs, mais comme de simples representations ne touchent pas toujours, de petits animaux tels que vous, je vous promets a la 1ère veue, de vous mettre toute nue, et de vous ètriller tant que je n’en pourray plus, je tacheray meme de grossir la verge de manière a vous èpouvanter, et suposé que la correction aille jusqu’au sang, j’en useray avec vous, comme le bourreau avec les criminels, je repandray des liqueurs dans la playe. C’est assés parlé de punition, en attendant que je remplisse mes promesses. Tu n’aurois qu’a partir de Paris, sans me donner avis de ta marche, ou tu n’aurois qu’a ne point estre exacte a m’ecrire, il n’en faudroit pas d’avantage, pour me faire couper la verge dont je te menace ; je verray donc si tu aime ceste verge, et si tu veux la recevoir ; pour moy je baiserois de bon cœur tous les endroits ou je fraperois avec. Ce n’est pas cependant ce qui m’attache le plus a toy, ton cœur, ton caractere, me seront toujours infiniment chers, et je te promets bien de rester toute ma vie d’une fidelité a toute èpreuve. Je n’ay par exemple, point eu le moindre desir de te trahir, et cependant la verge a souvent été en bon êtat de le faire.

On debite icy des nouvelles qui formeroient de trés grands evenemens, si elles étoient vrayes, tu es a portée de les scavoir, et de voir tout ce qui se passe, tachons de profiter de tout pour nous rejoindre ; j’aurois je t’asseure autant de plaisir et d’empressement de te retrouver, que j’ay senti de chagrin et de repugnance a m’éloigner de toy ; il me semble que je t’aime mille fois davantage que j’en fesois, je croyois cependant qu’on ne pouvoit point aimer plus parfaitement et malgré tout cela je voudrois t’aimer encore davantage. Fais bien ma cour au cher pere et a la chere mere. J’ecriray au cher pere par le premier courrier. A Dieu mon monstre je t’embrasse depuis la teste jusques au pieds, et je ne me rassasie pas de songer que je pourrois te baiser partout.

16

Fig. 14 : Début de la lettre du 24 août 1741 dans laquelle François compose un poème à sa femme. Voir aussi fig. 1.

[Cachet de la poste au dos :] De Toulouse

[Adresse au dos :] A Madame. Madame Frezals a l’hotel de Condé a Paris.

A Toulouse le 24 Aoust 1741

Souffre, ma chere amie, que je rappelle une faute passée, et que j’en tire quelque avantage ; avant d’estre heureux, c’est-à-dire d’estre a toy, j’oubliois fort bien le jour de ta feste, et quoy que je crusse t’aimer parfaitement, certaines attentions m’échapoient, sans que j’en aperçûsse le crime ; aujourd’huy je me le reprocherois et je serois au desespoir de manquer aux plus petits soins c’est par exemple ta feste demain.

Que de mortels vous celebre Loüis
Ce roy qui fut riche aux rives de la Seine
Dont les vertus les travaux inoüis,
Brillerent au dela de l’empire des Comnene[92] ;
De ce nom plus que moy qui doit être eblouis
C’est celuy de nos Rois et de ma Souveraine ;
Chere Louise ! objet charmant !
Plus je connois ton cœur ton caractere
Plus je deviens tendre et parfait amant
Plus je ressens le bonheur de te plaire.
A ta franchise a ta douceur
J’ay consacré mon ame entiere
D’un bien plus precieux si j’etois possesseur
Que ce bien pût te satisfaire
Quelle felicité, que de plaisir !
Je comblerois tes vœux et mes desirs.

Si j’étois a Paris et que tu fusses en Province, je ne serois point en peine de t’envoyer quelque bouquet, mais je t’avoue qu’après y avoir bien reflechi avec Blanquette[93], nous sommes demeuré d’accords, que je ne trouverois rien icy qui pût te plaire, a moins que je n’alasse moy même t’offrir tout ce qui t’apartient, et que je me garderay bien de t’envoyer sans moy ; encor me resteroit il un soin, qui seroit de savoir si le porteur te seroit agreable. J’aprehende que tu ne sois degoutée des hommes et que ce qui leur ressemble ne te fasse peur ; Pour moy j’eprouve que tous les sots contes que l’on fait de l’amour et de l’hymen n’ont aucun fondement ; sans cesse j’entends dire que la derniere faveur est le tombeau de l’amour ; Que l’hymen est le tombeau de l’amour, et mille autres sottises dans le même gout, mais je sens tout le contraire.

Auparavant l’Ego vos conjungo,
L’hymen m’offroit a toy comme Mary ;
L’amour depuis, par un doux vertigo
Au lieu d’Epoux, te donne un favory.

En effet je t’aime davantage que je ne t’ay jamais aimée, j’aprehende toujours de ne point t’aimer assés, je suis tenté de croire que tu m’as ensorcelé ; le pis que j’y trouve, c’est que si le sortilege est dans le temple de Cupidon, je ne seray jamais las de m’ensorceler et cela ne m’otera pas le desir d’y faire maintes stations. Dis moy je te prie comment gouverne tu ce temple, le Portail ne prend il pas quelque fois, la couleur de la cornaline, aimes tu cette couleur, et serois tu fachée, que je la conjurasse encore une fois. Voicy a ce propos un conte qui n’est pas de moy[94], et qui n’en vaut que mieux, tu me diras ce que tu auras pensé en le lisant.

Jeune tendron pour la premiere fois
Goutois les fruits amers de l’hymenée :
La pauvre enfant se vit presqu’aux abois
Quand mit au jour sa premiere lignée
L’époux èmu de la voir tant souffrir ;
Luy dit, ma chere, en honneur je te jure
Que dans la suite aimerois mieux mourir
Qu’ainsi te faire endurer la torture.
La dame alors regardant son Epoux
Luy repartit ; eh ! pourquoy pleurez-vous ?
Si peu de chose, helas, vous effarouche ?
Je n’ay besoin de si fausse pitié.
Chacun me dit qu’à la seconde couche
Mal ne sera si vif de moitié.

Je voudrois scavoir si le jour de ta feste, tu aurois volontiers essayé, si ce conte n’est pas une realité, car effectivement j’ay ouy dire, et je le crois, que la premiere fois que les Portes du temple s’ouvrent et que l’amour y entre triomphant, le Temple et l’amour souffrent beaucoup ; il pourroit bien en estre de même de la premiere couche, ainsi je l’attend a la seconde, mais si cette seconde est aussi laborieuse que la premiere, je te promets de tenir le temple fermé, et l’amour enchainé.

Marthe en travail d’Enfant promettoit a la vierge
A tous les saints du Paradis,
De n’aprocher jamais de ces hommes maudits :
Michel cependant luy tenoit un St. Cierge,
D’une grande vertu pour les accouchements.
Elle accouche, et sitôt qu’elle eu repris ses sens ;
Hé mon Dieu ! Ma pauvre Michelle
Dit elle d’une foible vo[ix,]
Eteignez la Sainte chandelle ;
Ce sera pour une autre fois.[95]

Tu peux faire ce conte la a Mademoiselle Forges[96]. Peut estre n’est il pas dans son recueil. Fais luy mes complimens ainsi qua sa compagne Torticolis[97]. Asseure le cher Pere et la chere mere de mon respect. Sois bien convaincue que je t’adore, et que mon plus grand bonheur, consiste a me persuader que tu m’aimes autant que ton indifference naturelle se permets de le faire. Adieu monstre caresse pour moy le petit minet[98].


[1] Voir Jean-Pierre Bardet, Élisabeth Arnoul, François-Joseph Ruggiu, Les écrits du for privé en Europe : du Moyen âge à l’époque contemporaine : enquêtes, analyses, publications, Bordeaux : Presses universitaires de Bordeaux, 2010.

[2] François est né le 25/10/1699 à Milly-sur-Therain ; Louise le 29/08/1711 à Braine. On trouvera sur http://geneanet.org/gautlang la généalogie et l’ensemble des pièces justificatives n’ayant pu prendre place dans cet article.

[3] Un certain Simon de Frezals fait hommage en 1285 au roi Philippe-le-Hardi pour la baronnie d’Avèze, près du Vigan. Ses descendants sont attestés à Saint-Geniès-d’Olt, dans l’Aveyron, entre le XIVe et la fin du XVIIe siècle. Dans l’église de Saint-Geniès-d’Olt subsiste le tombeau, daté du début du XVe siècle, de Simon de Frézals, petit-neveu du pape Clément VI, et d’Éléonore de Frézals, épouse du comte de Sommerset. À cette date la famille appartient donc à la haute aristocratie du Rouergue. Mais à l’époque moderne on rencontre des Frézals appartenant plutôt à la noblesse de robe et au haut clergé : certains occupent des fonctions de juge, de conseiller au parlement, d’abbé, ou d’archidiacre dans diverses localités du Rouergue et à Toulouse. Parmi eux, Victor de Frézals (1622-1682), conseiller au parlement de Toulouse, seigneur de Vabre et marquis de Beaufort ou d’Avèze, qui possède l’hôtel particulier du même nom à Toulouse, maintenant appelé hôtel de Pierre ou Daguin. Voir Jean Benoist, Suite de l’Histoire des albigeois…, Toulouse : J. et G. Pech, 1693 ; Jean Louis Étienne Bousquet, Études historiques sur la ville de Saint-Geniez-d’Olt, Ratery, 1846, p. 212-227 ; Revue Historique de Toulouse, 1921 ; Hippolyte de Barrau, « De Frésart ou Frésals », Documens historiques et généalogiques sur les familles et les hommes remarquables du Rouergue dans les temps anciens et modernes, Ratery, 1857. p. 341-346. C’est ce dernier qui affirme que les Frézals implantés au XVIIIe siècle dans le Soissonnais et présents à Compiègne au siècle suivant sous le nom de Fresals de Bourfaud, descendent de la même famille.

[4] Dans son étude sur les fermiers généraux Yves Durand affirme : « L’opinion publique déclare que ce sont des laquais enrichis, mais eux-mêmes se déclarent de vieille noblesse d’épée », Les fermiers généraux au XVIIIe siècle, Paris : Maisonneuve et Larose, 1996, p. 251.

[5] Inventaire des archives départementales antérieures à 1790, Aisne.

[6] Le 29 août 1711. Inventaire sommaire des archives départementales antérieures à 1790, Aisne, vol. 5, 1906, p. 123.

[7] Guy Chaussinand-Nogaret, Les Financiers de Languedoc au XVIIIe siècle, Paris, SEVPEN, 1970.

[8] Lequel décède le 27 janvier 1740 à Chantilly, puis est transporté à l’hôtel de Condé où son corps est exposé pendant 8 jours.

[9] Journal et mémoires du marquis d’Argenson, J. Renouard, 1859, vol. II, p. 230.

[10] Voir Pierre Roux, Les fermes d’impôts sous l’ancien régime…, Paris : A. Rousseau, 1916, 664 p.

[11] Voir Nouvelles instructions generales pour la perception des droits des domaines…, Paris : Prault, 1738, 417 p ; Jean-Paul Massaloux, La régie de l’enregistrement et des domaines aux XVIIIe et XIXe siècles : étude historique, Genève : Droz, Paris : H. Champion, 1989, 414 p.

[12] Bosquet, Dictionnaire raisonné des domaines et droits domaniaux, Rouen, 1762, vol. 2, p. 63. Voir aussi Marie-Laure Legay, Thomas Boullu, (dir.), « Directeur, direction », Dictionnaire de la Ferme générale (1640-1794), en ligne sur Hypotheses.org, consulté le 4 mars 2022.

[13] Cachet ovale de 24 mm de grand axe, 21 mm de petit axe. Écu ovale aux armes de France (d’azur à trois fleurs de lys d’or), timbré d’une couronne royale, entouré d’un collier de l’ordre de saint Louis. Légende : « FERME DES DOMAINES ». Ce cachet est visible sur les lettres des 7 et 9 novembre 1740, des 1er et 7 mai 1741 (fig. 7).

[14] Ce cachet est visible sur les lettres du 11 et 15 avril, du 16 mai et 27 juillet 1741 (fig. 8). Cachet ovale de 18 mm de grand axe, 16 mm de petit axe. Écu ovale fascé de huit pièces, au pal brochant le tout, timbré d’une couronne comtale (c’est-à-dire à 9 boules). Pas de légende. Si le graveur a respecté les codes graphiques en usage dans l’héraldique du XVIIIe siècle, comme dans l’autre cachet où le champ est rempli de hachures horizontales correspondant à l’azur, les émaux et métaux de l’écu peuvent être restitués. Les fasces sont couvertes de hachures verticales, ce qui correspond à gueule soit rouge, le champ et le pal sont lisses, ce qui correspond à l’argent. On peut donc blasonner de la manière suivante : « fascé d’argent et de gueule, au pal d’argent » (voir fig. 15).

Fig. 15 : armoiries figurant sur le cachet de François de Frézals

Une interrogation du moteur de recherche Google sur les armoriaux en ligne sur internet n’a pas permis de retrouver d’armes identiques. Les armoriaux modernes donnent diverses armoiries pour des Frezals (ou Fresals) : FRESALS (de) Toulouse : « Écartelé : au 1, un arc posé en fasce encoché d’une flèche en pal ; au 2, d’azur, au lion d’argent ; au 3, d’azur, à neuf losanges d’argent, 4, 3 et 2 ; au 4, d’argent, à une foi vêtue mouvant des flancs. Sur le tout, d’argent, au chevron d’azur, accolé de trois (Rietstap-Rolland, Europe). DELISLE (ou FRESALS DE LISLE) (Marseille), seigneur du Roussillon, et Granville : « D’azur, à trois lys de jardin d’argent, tigés et feuillés de sinople. » (Artefeuil, Provence) ; FREZAL OU FREZALS DE LISLE Provence : « D’azur, à trois lys de jardin d’argent. » (Rietstap-Rolland, Europe) ; FREZALS DE BOURFAUD, Languedoc (JM16340) : « D’azur, à 3 fraises d’argent, rangées en fasce, les queues en bas. » (Jougla de Morenas, France) voir fig. 18 ; FREZALS Victor de Beaufort de Vabres, chevalier, marquis d’Avèze, baron de Beaufort, épouse de Jeanne d’Austry : « Écartelé : au 1 d’or, au lion de sable, lampassé de gueules ; au 2 d’azur, à trois bandes d’or ; au 3 de gueules, à sept losanges d’argent accolées posés 3, 3 et 1 ; au 4 de même à une tour d’argent ; sur le tout écartelé en a) et d) d’azur à trois fleurs de fraise d’argent, les queues en bande, en b) et c) d’azur, au chevron d’or, accompagné de trois roses d’argent » (Izarny-Gargas-Toulouse, Toulouse) ; FRÉZALS DE LA ROUMIGIÈRE (de) Antoine, élection de Millau : « D’azur, à 3 fraises d’argent, posées en fasce. » (Izarny, Rouergue).

On remarque qu’on retrouve dans la plupart de ces armoiries les trois fraises (ou fleurs de fraise), déjà présentes sur le tombeau des Frezals datant du XVe siècle situé dans l’église de Saint-Geniès-d’Olt. Cela s’explique par le fait qu’il s’agit d’armes parlantes, le nom Frézal évoquant celui de la fraise (fresa en occitan). Les lys ou les roses que l’on trouve sur les autres armoiries sont sans doute une mauvaise interprétation de la fleur de fraise. Ces armoiries se ressemblent donc toutes par leur meuble. Cela ne suffirait pas à prouver leur parenté si l’on ne remarquait qu’elles ont toutes un champ d’azur et le meuble principal d’argent. On peut en conclure que soit toutes ces familles sont apparentées, soit que certaines de ces familles ont copié leurs armoiries sur les autres. En tout état de cause, les armes originales des Frézals seraient donc « d’azur à trois fraises d’argent ».

Si François de Frézals ne porte pas ces dernières armoiries, cela ne signifie pas qu’il n’appartient pas aux familles qui les portent. Il peut avoir repris des armoiries maternelles, ou avoir créé de nouvelles armoiries.

[15] Cachet ovale de 18 mm de grand axe et 16 mm de petit axe. Le monogramme, difficile à lire, semble constitué par deux F, l’un à l’endroit, l’autre à l’envers, entrelacés ; le tout surmonté d’une couronne comtale. Il est visible sur sa dernière lettre, datée du 28 août 1741.

[16] Journal et mémoires du marquis d’Argenson, vol. II, p. 229 ; Edmond-Jean-François Barbier, Chronique de la régence et du règne de Louis XV (1718-1763), Paris : Charpentier, 1857-1866, tome III, p. 193.

[17] Voir Edmond-Jean-François Barbier, Op. cit. tome III, p. 285-287. Charles-Philippe d’Albert de Luynes, Mémoires du duc de Luynes sur la cour de Louis XV (1735-1758), tome 3, Paris : Firmin Didot, 1860, p. 421 et suiv. Léonce de Piépape, Histoire des princes de Condé au XVIIIe siècle, p. 374. En 1731 la duchesse avait eu la petite vérole puis, en 1736, était retombée malade à la suite de ses couches à cause, dit-on, d’une perte de lait qui dégénéra en affection de poitrine tout comme sa sœur morte en 1735. Malgré les eaux de Forges (fig. 10), prises à partir de 1740, elle ne fit que languir et mourut le 14 juin 1741. Elle fut exposée pendant 8 jours dans une chapelle ardente dans ses appartements de l’hôtel de Condé avant d’être enterrée aux Carmélites du faubourg Saint-Jacques.

[18] Archives municipales de Toulouse, registres de sépultures de Saint-Étienne. L’église Saint-Jacques était située le long du cloître de la cathédrale Saint-Étienne. Elle fut détruite avec ce cloitre en 1811. Annexe de la cathédrale, elle abritait deux confréries, l’une dédiée à Saint-Jacques, l’autre à Sainte-Anne. Voir Quitterie Cazes, Le quartier canonial de Saint-Étienne de Toulouse, Carcassonne : Centre d’archéologie médiévale du Languedoc, 1998. C’est peut-être comme membre d’une de ces confréries que François de Frézals fut enterré à Saint-Jacques.

[19] Bosquet, Opus cit. tome II, p. 580.

[20] Un inventaire après décès est réalisé le 26 mars 1744 par le notaire parisien Michel de Saint-Georges. Archives nationales, Paris, Minutier central des notaires, MC/ET/IV/526.

[21] Contrat de mariage passé le 16 mai 1746 devant Jean Andrieu notaire à Paris. Archives Merlin et minutier central des notaires parisiens, étude IV.

[22] Archives qui m’ont été prêtées par un cousin, Henri Merlin (1925-2018), que je remercie vivement ici.

[23] Madame Loiseaux : personne non identifiée.

[24] Guy Chartraire de Saint-Aignan, conseiller au parlement de Dijon, qui fit reconstruire l’hôtel du même nom au 8, rue de Tournon à Paris en 1713. Voir Charles Lefeuve, Les anciennes maisons de Paris. Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, tome 3, 1875, p. 182. Le gouverneur de Bourgogne est à cette date le duc de Bourbon-Condé, que Saint-Aignan, de par ses fonctions, doit fréquenter. Ces relations expliquent peut-être le passage de Louise de Larzillière de l’hôtel de Saint-Aignan à celui de Condé.

[25] Les Cévennes, au Nord de Montpellier, sont l’un des centres de production de vers à soie.

[26] Selon l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, capillaire est le nom donné à cinq plantes de la famille des fougères dont on tire un sirop, parmi lesquelles l’adiante blanc (adiantum foliis coriandri), ou capillaire de Montpellier (fig. 16) : « Capillaire, (sirop de) se prépare de plusieurs façons ; le meilleur est celui qui nous vient de Montpellier. Sirop de capillaire, selon la Pharmacopée nouvelle de Paris. Prenez capillaire de Canada deux onces ; faites-les infuser pendant deux heures, en y versant eau bouillante six livres : cette infusion se fera dans un vaisseau fermé ; on y fondra sucre blanc six livres ; on clarifiera ensuite, & l’on fera cuire à consistance de sirop, ou mieux encore à consistance d’éectuaire : on y ajoûtera une nouvelle infusion de capillaire ; on aromatisera ensuite le sirop avec l’eau de fleur d’orange. Le sirop de capillaire est très vanté ; il possede toutes les vertus de cette plante : on l’employe dans les maladies de poitrine : on le mêle dans la tisane ordinaire ; dans les émulsions, dans le thé, pour les rendre plus adoucissans. » Voir aussi Pierre Formi, Traité de l’adianton ou cheveu de Vénus, contenant la description, les utilités et les diverses préparations de cette plante, Montpellier, 1644.

Fig. 16 : Capillaire de Montpellier ou Adianthum capillus-veneris (Linné). (Illustration extraite de la Flore de l’Aude par Athanase Py. Bibliothèque de Toulouse, ms Res E 40-1, t. 20).

[27] Sans doute Jacques de Flesselles, né en 1699, banquier, secrétaire du roi, ou son fils Jacques (1721-1789) qui fit carrière dans l’administration provinciale dans la seconde moitié du XVIIe siècle : intendant de Moulins, Rennes, Lyon, puis dernier prévôt des marchands de Paris, massacré en 1789 à Paris. L’un des deux est nommé receveur général des domaines et bois d’Alençon en 1740.

[28] Hermasn ?

[29] Sans doute le frère de Louise : Louis Claude de Larzillière, avocat au parlement, bailli du comté de Braine (1746-1755), subdélégué de l’intendance de Soissons à Braine (1755).

[30] Un cousin de Frézals, selon la lettre du 16 mai 1741.

[31] Louis Claude de Larzillière qui en tant qu’avocat au parlement de Soissons pouvait aussi exercer des fonctions de juge.

[32] Le cousin et la cousine de Louise ne sont pas identifiés, mais l’un d’eux porte le nom de Larzillière puisque c’est celui des deux parents de Louise, et ils vivent à Paris.

[33] Henriette Julie de Durfort-Duras, princesse d’Egmont-Pignatelli.

[34] Marie Charles Louis d’Albert de Luynes, duc de Chevreuse (1717-1771), beau-frère de Madame d’Egmont.

[35] Sans doute Caroline de Hesse-Rheinfels, duchesse de Bourbon-Condé (1714-1741) qui épouse en 1728 le duc Louis-Henri de Bourbon-Condé et décède à Paris le 14 juin 1741.

[36] Depuis 1740 la duchesse se soigne aux eaux de Forges près de Dieppe, à la suite de sa belle-mère, la duchesse douairière de Bourbon-Condé. Cette station thermale (fig. 10), réputée pour ses eaux ferrugineuses utilisées pour combattre l’anémie, est fréquentée par la cour depuis Louis XIII.

[37] Louis François Armand de Vignerot du Plessis, duc de Richelieu, (1696-1788), nommé lieutenant général de la province de Languedoc. Sur sa réception à Toulouse voir Juliette Berthier, Recevoir en sa ville. Les Capitouls et leurs invités au XVIIIe siècle, Mémoire de Master 1 sous la direction de Sylvie Mouysset, Université Toulouse II – Jean Jaurès, Master Histoire et civilisations modernes et contemporaines 2016–2017.

[38] Peut-être Philippe Guillaume Jacquier de Vieuxmaison (1700-1791), conseiller au parlement de Paris, qui avait épousé la fille d’un fermier général. Voir Yves Durand, Op. cit. p. 389.

[39] Sans doute Caroline de Hesse, ou sa belle-mère Louise Françoise de Bourbon (1673-1743), fille de Louis XIV et de Madame de Montespan.

[40] L’azerole est un fruit qui ressemble à une petite cerise rouge ou jaune, poussant sur l’azerolier, variété de grande aubépine. L’azerolier est cultivé dans le Midi de la France et la confiture d’azeroles est une spécialité des Cévennes (fig. 17).

Fig. 17 : Azérolier ou Crataegus azarolus (Linné). (Illustration extraite de la Flore de l’Aude par Athanase Py. Bibliothèque de Toulouse, ms Res E 40-1, t. 18).

[41] Sans doute Henri Joseph de Nigry, premier consul de Montpellier en 1732.

[42] Vaslet : personne non identifiée.

[43] Ramond : personne non identifiée.

[44] Sans doute Antoine Pierre Mirleau de Neuville, fermier général, Voir Yves Durand, Op. cit., 1996, p. 128-129. Ou son fils Louis Grégoire, directeur général des fermes à Soissons en 1751. Voir Bulletin de la Société académique de Laon, tome 10, 1860, p. 22.

[45] M. de Bourgogne : personne non identifiée.

[46] Landry : sans doute Clair-Louis Landry, receveur général des finances de la généralité de Riom, marié en 1729 à Angélique Bouret, sœur de trois fermiers généraux.

[47] Chaponel : Sans doute Jean-Baptiste Chaponel (vers 1693-1763), fermier des domaines du roi.

[48] Alexandre Mogé, sieur de Pramont, directeur des domaines à Montpellier, décédé en novembre 1740 et son épouse Madeleine Françoise Ferrand. Voir Bosquet, Op. cit. tome II, 1762, p. 579-580 ; Inventaire sommaire des Archives départementales antérieures à 1790, Hérault : B Archives civiles, p. 226.

[49] Le bail de six ans conclu entre le roi et les fermiers généraux.

[50] De Champlay : sans doute le financier parisien François Noël Gillet (1693-1769), seigneur de Champlay (Yonne), intéressé dans les fermes du roi, reçu secrétaire du roi en 1747.

[51] Il s’agit sans doute de mouchoirs en « indienne », tissu acheminé des Indes à Lorient par les bateaux de la Compagnie des Indes.

[52] Les appartements de la duchesse de Bourbon étaient situés à l’étage.

[53] Louis Gérard de Larzillière (1690-1753), substitut du procureur du roi au baillage de Soissons, officier de sa majesté et procureur fiscal du comté de Braine et son épouse Barbe Féval (1700-après 1755).

[54] Le 20 octobre 1740 meurt Charles VI de Habsbourg, empereur du Saint empire romain germanique, en laissant comme héritière de ses états patrimoniaux sa fille Marie-Thérèse d’Autriche. Profitant de la faiblesse supposée de la souveraine, Charles-Albert, duc de Bavière, soutenu par la Prusse puis la France et l’Espagne, prétend à la succession de Charles VI dans l’Empire et en Autriche.

[55] Frédéric II se lance dans la conquête de la Silésie, sur Autriche, en décembre 1740. Cet acte marque le début de la Guerre de succession d’Autriche, qui se termine en 1748 avec le traité d’Aix-la-Chapelle.

[56] L’Espagne, où règne comme en France un Bourbon, est l’alliée naturelle de la France contre les Habsbourg. Philippe V d’Espagne fait passer des troupes en Italie pour soutenir son fils Charles, duc de Parme et de Plaisance, roi de Naples et Sicile.

[57] Le chambellan Bürhen, désigné comme régent par la tsarine Anne Ier pendant la minorité d’Ivan VI, est écarté du pouvoir le 9 novembre 1740 au profit d’Anna Léopoldovna, mère d’Ivan VI.

[58] Il s’agit sans doute d’Antoine de Laurès (1708-1779), poète et auteur dramatique né à Gignac près de Montpellier, fils de Claude-Joseph, conseiller à la cour des comptes des aides et des finances de Montpellier. Voir Régis de Saint-Jouan et Jacques Reilhan de Carnas, « Généalogie de la famille de Laurès » dans Claude-Daniel de Laurès. Mémoire pour servir l’histoire de la ville de Gignac et de ses environs, Arts et traditions rurales, 2004.

[59] L’oraison de Saint Julien l’hospitalier était invoquée par les voyageurs demandant un bon gîte et une protection contre les périls. Cette oraison apparaît dans un conte de Jean de la Fontaine, inspiré d’un conte du Decamerone de Boccace. Dans ce conte un voyageur, dépouillé par des brigands et mourant de froid, est sauvé grâce à l’hospitalité d’une veuve. Celle-ci lui offre non seulement le gîte et le couvert mais aussi l’amour. C’est sans doute au caractère galant de cette histoire que fait allusion Frézals. Un poème de Voltaire confirme que l’expression « faire l’oraison de Saint-Julien » peut prendre au XVIIIe siècle un sens coquin : demander l’hospitalité amoureuse d’une dame.

[60] Malibran. Famille de marchands et banquiers originaire de l’Hérault, implantée dans plusieurs pays. Un Antoine Malibran, bourgeois de Pézenas, est avocat au début du XVIIIe siècle.

[61] Sans doute Pierre Gilbert de Voisins (1684-1769), seigneur de Voisins et marquis de Villaines, magistrat qui fit une brillante carrière à Paris dans le barreau et comme conseiller du roi ; ou son fils Pierre Paul Gilbert de Voisins (1715-1754), avocat au Parlement de Paris. Voir Michaud, Biographie universelle…, Firmin-Didot, tome 16, 1856, p. 450-451 ; J.-F. Bluche, L’origine des magistrats du Parlement de Paris, Paris : C. Klincksieck, 1956.

[62] Morette : personne non identifiée.

[63] Sans doute une personne appartenant à la famille noble de Montjuif, implantée dans le Toulousain depuis le Moyen Âge.

[64] Il s’agit peut-être de Jean Louis Bernard de Frézals de Bourfaud, qui commence une carrière militaire en 1728 et prend sa retraite en 1773 avec le grade de brigadier (fig. 18). Brigadier étant sous l’Ancien Régime le grade équivalent à général. Ses descendants s’installent à Compiègne. Voir Gustave Chaix d’Este-Ange, Dictionnaire des familles françaises anciennes ou notables à la fin du XIXe siècle, tome 19, p. 281 ; Bulletin de la Société historique de Compiègne, 1911, p. 185, 1926, p. 22, 1938, p. 58.

Fig. 18 : L’un des frères de François : Jean-Louis Bernard de Frézals de Bourfaud, peint par Molinet en 1760. (Musée de l’armée, Paris).

[65] Abbé défroqué : personne non identifiée.

[66] Sans doute une allusion au patois picard parlé dans la région d’origine des deux époux.

[67] Gabriel de Jort de Fribois, fermier général dont il est question dans la lettre suivante.

[68] De Mogé du Chassin, Directeur général du domaine du roy et du franc fief en la généralité de Montpellier, successeur d’Alexandre Mogé, sieur de Pramont.

[69] Bonefaux : personne non identifiée.

[70] Il existe une famille de notables toulousains du nom de Godefroy.

[71] Henriette Nicole d’Egmont-Pignatelli, duchesse de Chevreuse (1719-1782).

[72] Marie Charles Louis d’Albert de Luynes, duc de Chevreuse (1717-1771), époux de la précédente. Selon le duc de Luynes son père, le duc et la duchesse de Chevreuse et leur oncle partent fin décembre 1740 à Toulouse pour aller solliciter un procès, procès dont il est question dans la lettre du 16 mai 1741. Ce procès, mené contre Madame de Caylus, concernait des terres en Languedoc faisant partie de la donation faite par Madame de Saissac à M. de Grimberghen, et par M. de Grimberghen au duc. La conclusion de ce procès intervient en faveur du duc en juin 1742. Voir Charles-Philippe d’Albert de Luynes, Op. cit. tome 3, p. 290, tome 4, p. 176.

[73] Paul d’Albert de Luynes, évêque de Bayeux (1703-1788), oncle du duc de Chevreuse.

[74] Abbé Descoleté : sans doute un surnom pour l’abbé défroqué dont il est question dans la lettre du 11 avril 1741.

[75] Gabriel de Jort de Fribois, fermier général. Voir Yves Durand, Op. cit. p. 377-378.

[76] Peut-être le fermier général du même nom, voir Almanach royal, 1740, p. 333.

[77] François Augustin Paradis de Moncrif (1687-1770), financier acquéreur, en 1716, de l’office de receveur général des domaines et bois de la généralité d’Auch. Il est plus connu comme écrivain et poète, élu à l’académie française en 1733.

[78] Françoise de Roquelaure (1683-1741), veuve de Louis II de Rohan-Chabot, prince de Léon et duc de Rohan, décédée le 5 mai 1741 à Toulouse. Le duc de Luynes rapporte cet évènement de la façon suivante : « Du Mercredi 10, Marly. On a appris aujourd’hui la nouvelle de la mort de Madame la princesse de Léon, à Toulouse, où elle etoit depuis déjà assez de temps à suivre beaucoup de procès qu’elle avait à ce parlement. » Voir Charles-Philippe d’Albert de Luynes, Op. cit. tome 3, p. 391.

[79] François de Frézals a sans doute écrit Évreux pour Bayeux. Car l’évêque de Bayeux, déjà cité, est l’oncle du duc de Chevreuse. Mais on ne voit pas ce que ferait Pierre-Jules-César de Rochechouard-Montigny, évêque d’Évreux de 1733 à 1753, aux côtés du duc.

[80] Beauclair : un cousin de Frézals selon la lettre du 16 mai 1741.

[81] Madame Chatillon : personne non identifiée.

[82] Madame Daigremont : personne non identifiée.

[83] Madame Marchand : personne non identifiée.

[84] Mademoiselle Ocrine : Caroline de Hesse-Rheinfels, duchesse de Bourbon, princesse de Condé.

[85] M. Ramond : personne non identifiée.

[86] Le seigneur Machiavel : cette expression désigne sans doute le fermier général de Neuville, dont Frézals se plaint dans sa lettre du 17 juin 1741.

[87] De Jort de Fribois, voir plus haut.

[88] De Jort de Fribois loge donc chez le neveu de l’un de ses associés, le fermier général de Neuville.

[89] La Ferme générale.

[90] Sans doute le valet dont il est question dans la lettre du 17 novembre 1740.

[91] Vinere, tailleur : personne non identifiée.

[92] Comnène : dynastie qui règne sur l’Empire byzantin aux XIe et XIIe siècles, puis sur l’Empire de Trébizonde jusqu’au milieu du XVe siècle.

[93] Blanquette : personne non identifiée.

[94] Le poème est de Jean Baptiste Joseph Willart de Grécourt (1683-1743). Il s’intitule « La jeune femme en couche, conte, par M. de R*** ». Le texte publié dans les Œuvres complètes de Grécourt comporte quelques variantes par rapport à celui de la lettre, soit que Grécourt en ait réalisé plusieurs versions, soit que François de Frézals l’ait modifié. Voici le texte publié :

Jeune tendron, pour la première fois
Goûtait des fruits amers de l’hyménée.
La pauvre enfant se vit presque aux abois
Quand mit au jour sa trop chère lignée.
Son compagnon qui la voyait souffrir :
Par saint Joseph, lui dit-il, je te jure
Que dans la suite aimerais mieux mourir
Qu’ainsi te faire endurer la torture.
La dame alors, regardant son époux,
Lui repartit : Ah ! pourquoi jurez-vous ?
Quoi ! ce rien-là, mon fils, vous effarouche ?
Je n’ai besoin de si grande pitié.
Las ! on m’a dit qu’à la seconde couche
Le mal n’étais si grand de la moitié

Oeuvres complettes de Grécourt, Nouv. éd. soigneusement corr., et augm. d’un grand nombre de pièces qui n’avaient jamais été imprimées, A Luxembourg : [s.n.], an X (1802), tome 8, p. 197.

[95] Ce poème est de l’abbé François-Séraphin Régnier-Desmaret (1632-1713), secrétaire perpétuel de l’académie française. Il est publié dans ses Poësies françoises, dont la première édition date de 1707. Il a été également repris dans un recueil, Nouveau recueil des epigrammatistes françois, anciens et modernes, publié par Antoine Augustin Bruzen de La Martinière en 1720.

[96] Mademoiselle Forges : ce surnom désigne sans doute une personne fréquentant les eaux de Forges, et ayant accouché ou sur le point d’accoucher. Cela pourrait s’appliquer à la duchesse Caroline, malade depuis ses couches en 1736, mais celle-ci est décédée depuis deux mois. François de Frézals l’ignore-t-il ? C’est peu probable.

[97] Sans doute le surnom d’une compagne de Louise.

[98] Allusion érotique.

Pour en savoir plus :

La généalogie de l’auteur François de Frézals, et de la destinataire Louise de Larzillière, est consultable sur Geneanet.

Cet article est la version enrichie de celui paru dans la revue Dix-huitième siècle, éditée par la Société française d’étude du Dix-Huitième siècle. La revue est consultable dans la plupart des bibliothèques des grandes villes et les bibliothèques universitaires. Elle est accessible gratuitement en ligne, sauf les trois derniers numéros.

Gauthier Langlois, « La correspondance amoureuse de François de Frézals, financier en Languedoc (1732-1741) », Dix-huitième siècle, n° 50, 2018, p. 635-662.

Résumé : Entre 1732 et 1741 François de Frézals, directeur des domaines de la généralité de Toulouse, entretient une correspondance avec son épouse, Louise de Larzillière, femme de chambre de la princesse de Bourbon-Condé à Paris. Les seize lettres conservées, rédigées dans un style galant, libertin, érotique ou poétique, nous font pénétrer dans l’intimité d’un couple de la bourgeoisie cultivée du règne de Louis XV. On y perçoit aussi les rapports du couple avec la haute aristocratie (les Egmont, Bourbon-Condé, Chevreuse) et le monde de la finance (comme les fermiers généraux). L’édition de ces lettres constitue une intéressante source sur la société du XVIIIe siècle, en particulier sur l’amour et la santé.

Gauthier Langlois, « The correspondance in love of François de Frézals, financier en Languedoc (1732-1741) », Dix-huitième siècle, n° 50, 2018, p. 635-662.

Abstract : Between 1732 and 1741, François de Frézals, director of the Toulouse Crown lands, corresponded with his wife, Louise de Larzillière, the Bourbon-Condé Princess’s chambermaid in Paris. The sixteen preserved letters, written in a gallant, libertine, erotic or poetic style, convey the couple’s intimacy typical of the cultivated middle-classes in King Louis XV’s reign, as well as the couple’s relationship with the aristocracy (the Egmont, Bourbon-Condé, Chevreuse) and the financial sphere (such as the fermiers-généraux). The edition of these letters constitutes an interesting source on eighteenth-century society, especially love and health.

Gauthier Langlois, « La correspondencia enamorada de François de Frézals, financiero en Languedoc (1732-1741) », Dix-huitième siècle, n° 50, 2018, p. 635-662.

Resumen : Entre 1732 y 1741 François de Frézals, director del patrimonio real en Tolosa, mantiene una correspondencia con su esposa, Louise de Larzillière, camarera de la duquesa de Bourbon-Condé en París. Con las dieciséis conservadas cartas, redactadas en un estilo cortés, libertino, erótico o poético, penetramos en la intimidad de una pareja de la burguesía cultivada del reino de Luis XV. Percibimos también las relaciones de la pareja con la alta aristocracia (como los Egmont, Bourbon-Condé, Chevreuse) y el mundo de las finanzas (los recaudadores de impuestos). La edición de estas cartas constituye una interesante fuente sobre la sociedad del siglo XVIII, en particular sobre el amor y la salud.

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2 commentaires pour La correspondance amoureuse d’un financier en Languedoc avec la femme de chambre de la princesse de Condé (XVIIIe siècle)

  1. GENEST JC dit :

    L’utilisation de ces lettres a été faite de manière tout à fait remarquable . Un travail soigné et une contribution exemplaire à la mémoire de la haute société française au 18è siècle.

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